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Comment la République veut atteindre l’Universel par le Grand Remplacement

Après la fin de la guerre mondiale de 1914-1945, l’universalisme républicain va être réorienté. Dans un contexte marqué par la décolonisation et l’émancipation des peuples, il ne s’agira plus de conquérir des « indigènes » pour assimiler, imposer les valeurs républicaines ou « transporter les Droits de l’homme au-delà des mers », mais de faire venir ces indigènes à soi, au milieu du peuple français, avec toujours le même objectif : les assimiler, leur proposer le « pacte républicain » et le « contrat social » qui en fera des associés à part entière, c’est-à-dire des citoyens. En fait, la République a eu l’outrecuidance de penser, — et elle le pense encore —, que l’assimilation républicaine des « indigènes » qu’elle n’avait pu réussir « chez eux », par la colonisation, serait réalisable « chez nous », par l’immigration.

La politique républicaine d’immigration se met en place dès 1946. Que cette politique ait eu une base « économique » est indéniable. L’universalisme républicain est indissociable de la volonté d’enrichissement de la caste au pouvoir. Cela est vrai à la période révolutionnaire : la guerre se justifie alors par le devoir d’apporter au « genre humain » une « liberté universelle », mais aussi par la nécessité d’abattre des frontières qui entravent le « commerce permanent », qui causent les « vicissitudes du champ monétaire, du commerce maritime et continental », qui « troublent la valeur des marchandises »[1]. Cela est vrai à la période coloniale où, voyez le discours de Ferry du 28 juillet 1885, la colonisation se justifie à la fois par le « devoir de civiliser » et par des « placements de capitaux des plus avantageux ». Les politiques d’immigration d’après-guerre n’échappent pas à la règle puisqu’elles se justifieront à la fois par leur côté humanitaire (droit d’asile…) et leur nécessité économique (l’immigration comme « enrichissement »… du patronat). La convergence d’intérêt entre une République universaloïde et une oligarchie apatride ne doit cependant pas nous faire oublier que la société ouverte est rendue possible par les principes structurants de la République, et seulement par ceux-ci.

Inutile de faire de long discours pour décrire une réalité par trop visible. Selon l’Insee, moins de 1 nouveau né sur 1000 porte un prénom musulman avant 1946. En 1946, pour la première fois dans notre histoire, 1000 nouveaux nés portent un prénom musulman. En 1958, 1% des nouveaux nés porte un prénom musulman. En 1983, ils sont 6,5%. Et en 2014, ils sont 18% ! Encore ne s’agit-il que de prénoms relatifs à une religion particulière. On ne parle pas ici de la totalité des nouveaux nés d’origine extra-européenne (sont exclus bon nombre d’Africains, les Antillais, les Juifs, les Asiatiques…). Les agences de marketing ethnique estiment que les communautés ethniques forment un marché de 13 à 17 millions de personnes, ce qui fait environ 25% de la population résidant en France. Il suffit de sortir de chez soi pour constater que les Allochtones sont « visiblement » en nombre important, parfois même majoritaires, et que leur présence est sans commune mesure avec ce qu’elle était il y a vingt, trente ou quarante ans. Ce n’est toutefois pas l’avis des républicains.

Le rapport relatif au droit des étrangers en France (Assemblée Nationale, 2 juillet 2015, N° 2923), énonce après les niaiseries d’usage (« La France est une terre d’immigration depuis des siècles [cela] n’a pas vocation à changer à l’heure de la mondialisation des échanges et de la circulation des personnes » ; La France « s’enrichit aujourd’hui de multiples apports venus des continents africain, asiatique, amérindien » ; il faut « privilégier la raison humaniste sur la crainte instinctive » ; «tradition d’ouverture de la France » ; «dégradation de l’image de notre pays dans le monde, le faisant parfois paraître frileux, acariâtre et replié sur lui-même » ; etc.), après donc ces incantations, le rapport énonce sentencieusement :

« Il y a 6 % d’étrangers en France : cette proportion est stable depuis plus d’un siècle » !

Le chiffre, pour étonnant qu’il soit, est cependant incontestable d’un point de vue républicain. Le décalage entre le chiffre annoncé et la réalité visible est l’œuvre du principe d’universalité. C’est en vertu de ce principe hérité de la philosophie du Contrat que le « corps politique » s’est ouvert à des millions d’étrangers, permettant ainsi de les faire disparaître en tant que tels. Ce recyclage juridico-administratif de l’altérité transformée en citoyenneté montre la nature réelle du régime en place. L’adhésion des « élus » républicains au dogme hypocrite de la « proportion d’étrangers stable depuis plus d’un siècle » démontre qu’ils approuvent ce recyclage par lequel un « corps d’associés » de plus en plus allochtone supplante et détruit le peuple français autochtone. Par les politiques d’immigration, la République fabrique industriellement du citoyen, jusqu’à faire disparaître le peuple-souche-qui-n’existe-pas dans le « creuset républicain ». Reconnaître le Grand Remplacement reviendrait à réfuter le « pacte républicain », c’est-à-dire la République issue de 1789. Cela, aucun républicain ne peut se le permettre… même pas une Marine Le Pen !

L’un des moments clé de cette politique républicaine d’immigration initiée à partir de 1946 a été le regroupement familial décrété par le tandem Giscard-Chirac (29 avril 1976). Il s’agit, selon le Secrétaire d’État aux travailleurs immigrés Paul Dijoud, de « changer la société française, la rendre plus juste, plus généreuse », de bâtir une « civilisation nouvelle » (sic !) qui n’exclut pas les étrangers et qui se fonde sur une « immigration organisée » (TF1, 27 juillet 1976). Le 10 novembre 1977, un décret de Raymond Barre, alors premier ministre, suspendait (pour des raisons économiques et administratives) le regroupement familial pour trois ans. Il arrive ainsi que des républicains « de droite », plus pragmatiques et moins fins connaisseurs du dogme que leurs homologues « de gauche », commettent des « dérapages ». Ce fut donc le cas de Raymond Barre qui fut rapidement recadré par le Conseil d’État. Le 08 décembre 1978, le Conseil juge « illégal » le décret Barre et l’annule purement et simplement ! Pour justifier sa décision, le Conseil d’État déclare que le décret Barre est contraire :

  • aux « Principes généraux du droit », c’est-à-dire aux « principes fondamentaux qui sont à la base de notre régime politique » ;
  • au Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 auquel se réfère celle du 4 octobre 1958 (ce préambule réaffirme la « Déclaration des droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République »).

Autrement dit, le décret Barre suspendant le regroupement familial est annulé en raison de sa non-conformité aux principes fondamentaux du régime en place. Mieux : le droit à l’immigration familiale résultant à la fois de la Constitution républicaine et des principes généraux du droit républicain, le « regroupement familial » était légitime et légal même avant le décret Giscard-Chirac de 1976, décret superfétatoire si l’on suit l’argumentation du Conseil d’État.

De cette affaire, aux conséquences dramatiques pour les Autochtones européens de France, il apparaît donc que selon les plus hautes instances de la République, l’immigration familiale pour créer une « civilisation nouvelle », selon l’expression de Paul Dijoud, est conforme aux principes fondamentaux de la République. François Hollande le rappellera aux républicains qui l’aurait oublié (octobre 2016) : « le regroupement familial, dira-t-t-il, fait partie des principes de la République » !

De tout cela, il faut tirer la conclusion qui s’impose : la société multiraciale, multiculturelle, multiconflictuelle que nous connaissons et qui est cause de tant de souffrances n’est pas accidentelle. Et le Grand Remplacement découle mécaniquement des «principes fondamentaux » du régime en place !

Antonin Campana


[1] Anacharsis Cloots, Étrennes du genre humain aux cosmopolites, 1793.

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