Vie des royalistes

Propos sur la violence de la révolution, plus particulièrement de 1789 à 1799

En ces jours où nous honorons la mémoire de Louis XVI, il m’a semblé intéressant de m’arrêter sur la période révolutionnaire et de comprendre en quoi cette « régénération » politique, idéologique, culturelle et religieuse fut spécifiquement violente. L’on pourrait penser tout de go à la Terreur mais celle-ci a duré moins de deux ans, s’installant progressivement. Paroxysme de la violence d’état et des exécutions de masse, elle court des massacres de septembre 1792 à la mort de Robespierre, le 27 juillet 1794. Cette aire d’années n’est pas suffisante pour illustrer ce que fut la Révolution.

La première cause de la violence durant cette terrible décennie de 1789-1799 est le combat des révolutionnaires contre les « ennemis de la patrie », l’ennemi intérieur, comprendre le royaliste, le prêtre toujours suspect et même les modérés, puisque Georges Danton fut lui-même considéré comme un dangereux traître à cause de ses positions [cf. la lutte entre Indulgents et Enragés, ndla]. La violence révolutionnaire ne fut pas l’apanage de la Terreur car les mouvements d’angoisse collective et les scènes d’émeutes ont existé avant 1792 et ont continué après le 9 Thermidor qui a vu la mort de Robespierre. Les premières scènes d’horreur se déroulent sans doute lors de la « prise » de la Bastille dont le gouverneur de Launay est lâchement exécuté, les jours suivants ce sont plusieurs proches de la famille royale et plus particulièrement de la reine qui sont tués, tels la Princesse de Polignac et le marquis de Flessel. Dès 1789, une peur infondée mais relayée par les adversaires les plus acharnés de la monarchie se propage : le pain va manquer et ceux accusés de créer la famine dans Paris sont assassinés et leur corps évidés remplis de foin. C’est un rituel : les « affameurs » sont remplis de ce blé qui manque. La violence se propage vite car l’opinion publique a fait son entrée dans l’histoire. On le sait, ce sont quelques agitateurs très motivés qui ont voulu, crée et relancé les exactions. Ces derniers ont une méthode qui va faire des émules : il faut déshumaniser l’aristocrate, le prêtre… en un mot celui qui est soupçonné d’être contre-révolutionnaire, accusé d’avoir volé au peuple et d’être surtout lié avec l’Autriche et la Prusse, qui « servent la tyrannie. » La première violence de masse significative eut lieu lors des camps de Jalès. Près de Nîmes, en 1790, une agitation sociale se transforme en un  rassemblement de 250 000 hommes qui publient un manifeste clairement opposé aux transformations sociales et politiques qui se jouent. Trois camps vont avoir lieu entre 1790 et 1792, le troisième camp va être particulièrement réprimé. Mais c’est la Vendée qui devient la victime expiatoire de la Révolution, cette dernière devant se prouver qu’elle peut vaincre « cette terre de brigand » dont la race doit disparaître. La Vendée s’est soulevée autant contre la levée de militaires que contre la Constitution Civile du Clergé. Si des révoltes ont éclaté en Bourgogne et en Provence, c’est la Vendée qui a su donner au combat contre ce régime devenu régicide une force qui va la dépasser. Contre les Blancs, la Convention connaît d’abord des échecs inattendus contre ces paysans menés par quelques aristocrates de province. Mais la violence d’état va reprendre le dessus : les généraux Hoche et Turreau sont victorieux à Lusson puis massacrent les vendéens le 2 décembre 1793 à Savenay. Les noyades de masse ont lieu en 1794, quelques temps avant la paix de la Jaunaye du 17 février 1795. La violence de la Révolution s’illustre donc non seulement à Paris mais aussi en province, puisque les ennemis de l’intérieur du nouveau régime sont surtout présents en province.

La deuxième cause de la violence révolutionnaire est l’instauration de la violence religieuse et symbolique. La Terreur, la Convention puis le Directoire vont officialiser cette violence et l’inclure dans le processus révolutionnaire. Le nouvel ordre issu de la pensée des « Lumières » et du développement du relativisme est un ordre qui peut se résumer en quelques points :

–          Incrédulité face à la Révélation (Montesquieu et Voltaire notamment) même s’il y a encore très peu d’athées

–          Importance de la science et de la philosophie face à la monarchie absolue

–          Renversement de l’ordre : celui-ci n’est plus divin et vertical puis horizontal mais seulement régi par le « grand architecte » qui est un Dieu abstrait et non plus le Christ.

Cette nouvelle organisation inclut nécessairement une refonte et un bouleversement de la société. Ainsi, la violence va se faire religieuse et symbolique. Le 4 août 1789, les privilèges sont abolis, cette nuit célèbre est l’essence de la Révolution avec la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qui remet en cause tout l’ordre social. La Constitution Civile du Clergé du 12 juillet 1790 est le summum du renversement de l’ancien ordre car elle prévoit qu’évêques et prêtres seront élus et devront prêter serment à la Convention. Le roi se rétracte après avoir signé la loi, et Pie VII publie la bulle Quod alliquantum contre cette constitution inique. Mais il est trop tard : l’ambiance est à la guerre civile en novembre 1790 : il y a près de 52% de prêtres jureurs, le reste devient illégal. La mise à mort du roi, sacré à Reims et au corps inviolable parce que garant du royaume tout entier, est bien-sûr hautement symbolique. Cette mort, comme celle de la reine, a été mise en scène pour bien signifier que l’on était entré dans le temps de la Révolution et que l’on ne pouvait faire machine arrière et revenir à la royauté.

Mais la Révolution va plus loin en imposant une nouvelle sacralité. C’est dans ce domaine que la Terreur a été plus violente que les autres régimes révolutionnaires. Le 10 novembre 1793, le premier temple de la Raison est ouvert dans une église profanée. Auparavant, le calendrier a été transformé et l’an 1792 est devenu l’an I de la République, le culte décadaire est instauré mais ne rencontre pas le succès espéré : il n’y a plus qu’un jour chômé tous les dix jours ! La nouvelle toponymie voulue est parfois ridicule, tel Grenoble qui devient Grelibre parce que le son même de « noble » est devenu blasphématoire ou encore Saint-Cyr l’Ecole qui est transformé en une improbable Bougie car « cyr » ressemble à « cire » donc à « bougie » ! Il faut une haine particulièrement tenace et ancrée pour infuser dans la société cette nouvelle religion. Car la spécificité de la Révolution est d’utiliser la violence comme une religion et contre l’alliance du trône et de l’autel, qui avait certes ses défauts, de fonder une nouvelle foi qui ne dit pas son nom : un déisme d’inspiration maçonnique qui légitime le pillage des sépultures royales à saint Denis et la massacre des opposants et de ceux qui sont simplement suspects d’en être !

A nous de nous méfier de toutes ces tyrannies dormantes, la mémoire du Roi Très-Chrétien Louis XVI peut nous aider à réfléchir sur le sens et l’importance de le Révolution, matrice idéologique des dictatures d’inspiration révolutionnaire.

Charles d’Antioche

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