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Ex-libris. « Histoire des traditionalistes » d’Yves Chiron

Yves Chiron, Histoire des traditionalistes, 2022, 640 p. 

Il s’agit d’un livre de référence, passionnant, qui a nécessité plus de 20 ans de travail à Yves Chiron, qui a consulté de nombreuses archives et sources inédites, réalisé de très nombreux entretiens et consulté l’intégralité de 21 périodiques traditionalistes dont Fideliter, Itinéraires, La Contre Réforme Catholique au XXe siècle, La Nef

Pour la première fois, cet ouvrage raconte l’histoire des « traditionalistes », catholiques qui critiquent ou rejettent le concile Vatican II et la réforme liturgique qui s’ensuivit. Il décrit aussi l’histoire de ces prêtres ou de ces laïcs qui, en France, aux États-Unis et dans d’autres pays, sans s’opposer au concile et à la « nouvelle messe », restent attachés à la liturgie traditionnelle et sont soucieux d’une défense de l’orthodoxie de la foi. Yves Chiron dévoile les origines de ce mouvement à l’époque de saint Pie X. Un dictionnaire biographique recensant plus d’une centaine de personnalités clôture l’ouvrage.

C’est donc sur une période de 120 ans, du début du XXe siècle jusqu’à nos jours qu’Yves Chiron décrit à partir des faits, déclarations et publications la chronologie des relations entre les traditionalistes, les évêques et Rome. Les soixante premières années jusqu’au concile Vatican II sont traitées assez rapidement en deux chapitres. Le premier chapitre décrit la condamnation du modernisme par saint Pie X, puis la condamnation de l’Action Française par Pie XI et la levée de cette condamnation par Pie XII. Le deuxième chapitre traite des crises du catholicisme français de 1944 à 1958 avec la question des prêtres ouvriers et du catéchisme progressif, où l’on voit l’emprise du progressisme, contenu par Pie XII.

Les treize chapitres suivants sont consacrés au concile Vatican II, à la réforme liturgique de 1970 et à leurs conséquences qui durent jusqu’à nos jours. On observe que le concile n’a pas été rejeté en bloc immédiatement mais que c’est l’imposition autoritaire du Novus Ordo Missae qui a cristallisé la résistance. On voit aussi la diversité des réactions et les divisions du monde traditionnel, Mgr Lefebvre et la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX), la Fraternité Saint-Pierre et les groupes Ecclesia Dei, l’abbé Georges de Nantes et sa Contre-Réforme-Catholique, les mouvements laïcs (Silencieux de l’Église, Une Voce…), les sédévacantistes et leurs différentes variantes.

On est frappé, sous Paul VI, par le laxisme de Rome vis-à-vis des innovations intempestives et de la dureté à l’égard des tenants de la tradition. La situation s’est lentement améliorée sous le pontificat de Jean-Paul II grâce en particulier au cardinal Ratzinger, préfet de la congrégation pour la Doctrine de la Foi pendant vingt ans. Une fois devenu le pape Benoit XVI, celui-ci libérera complètement l’usage de l’ancien rite selon le missel de 1962 par le motu proprio Summorum Pontificium de 2007, lèvera les excommunications des évêques sacrés en 1988 par Mgr Lefebvre et entreprendra des discussions doctrinales avec la FSSPX, qui n’aboutirons pas…

Le dernier chapitre décrit la situation depuis l’élection du pape François qui a eu des gestes en faveur de la FSSPX (reconnaissance de la validité des confessions et des mariages) tout en critiquant régulièrement les traditionalistes et en réduisant drastiquement la possibilité de célébrer selon le rite ancien (appelé « extraordinaire » par Benoit XVI), par son motu proprio Traditionis Custodes de juillet 2021.

La bataille entre modernistes/progressistes et traditionalistes/conservateurs continue et, à vue humaine, n’est pas prête de s’arrêter…

Michel Lachaussée

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