CivilisationHistoireRoyauté

Abrégé de l’Histoire de France, par Bossuet. Partie 5 : Sainte Bathilde, mère de rois et la Bretagne faisant allégeance à aux rois de France.


Nous vous proposons de revoir votre histoire de France, non pas à l’École de la République, ce serait une antihistoire, ni même à celle des nationalistes monarchistes du XXe siècle, tel Bainville, qui malgré leur bonne volonté ont oublié le Roi et la Religion, mais bien celle qu’apprenait le futur roi sous la direction d’un des plus grands noms de notre histoire : le cardinal Bossuet.

Vous y trouverez tout ce qu’il y a à savoir sur l’histoire de France, dans une optique d’enseignements pratiques de direction, ce dont nous avons cruellement besoin à notre époque plus qu’à toute autre.

Le bon Bossuet, avec une certaine objectivité, se borne à l’histoire et à la vraisemblance, évacuant au passage les aspects les plus improbables de notre légende nationale, dans le but ici de former un bon Roi.

Or, nous avons besoin de bons rois : dans nos familles, dans nos villages, dans nos entreprises et dans nos paroisses ! Alors formons-nous !

La Rédaction

 

DAGOBERT I. (An 628.)

Clotaire II étant mort l’an 628, Dagobert retourna en Neustrie pour prendre possession du royaume de son père, et ramena Pépin avec lui ; en apparence pour se servir de ses sages conseils, mais en effet de peur qu’il ne détournât les seigneurs d’Austrasie de son service, à cause du crédit qu’il avait dans ce pays. Il ne donna aucun partage à son frère Aribert : cela parut fort étrange, et tout à fait opposé à la coutume de la famille royale; de sorte que les seigneurs firent donner à ce prince une partie de l’Aquitaine et de la Septimanie, pour la posséder à titre de royaume. Il y vécut avec éclat, et sut très bien soutenir l’honneur de la royauté. Pour Dagobert, il fut fort adonné à ses passions; car outre un grand nombre de concubines, il eut encore en mêmr temps, en mariage légitime, trois femmes qu’il appela reines ; et ses excès furent poussés si loin, que les historiens ont eu honte de les rapporter. Outre cela il accabla le peuple d’impôts, et n’épargna pas même les biens des églises. Au milieu de tous ces désordres, il ne laissait pas de faire beaucoup de bien aux pauvres et aux monastères : telle élait la dévotion de ce prince. Son frère Aribert étant mort, et le fils de ce prince ayant aussi fort peu vécu, il retira les provinces qui lui avaient été données. Il donna à son fils Sigeliert le royaume d’Austrasie, où il l’envoya demeurer, en retenant cependant auprès de lui Pépin, qui en était maire. Il destina à Clovis, son second fils, le royaume de Neustrie, avec celui de Bourgogne.

Sur la fin de sa vie il prit une meilleure conduite. C’est lui qui a bâti et enrichi le fameux monastère de Saint-Denis, où les rois de Fiance sont enterrés, et où il a été inhumé lui-même. Ce fut en 635 que Judicaël, roi de la petite Bretagne, vient lui faire hommage à Clichi, et promit de lui être toujours soumis, ainsi qu’à ses successeurs.

 

SIGEBERT, etc. (An 614.)

Dagobert laissa ses deux fils fort jeunes. Ce fut eu ce temps-là que commenra le déclin de la maison royale, par l’énorme autorité qu’usurpèrent les maires du palais; car, comme ils gouvernaient tout durant la longue minorité de ces jeunes princes, ils les élevèrent dans l’oisiveté, sans leur inspirer aucuns sentiments dignes de leur rang et de leur naissance. Ainsi, ils les tinrent toujours dans leur dépendance, et c’est ce qui donna commencement à la fainéantise des rois. Sous Clovis, il y eut deux maires du palais, Ega et Erchinoalde,d’où les maisons d’Aulriche, de Lorraine, de Bade, et plusieurs autres, se disent descendues. Pépin eut la même charge sous Sigebert. Clovis fut tellement dépendant des commandements plutôt que des conseils d’Erchinoalde, maire du palais, que, par son autorité, il épousa une esclave nommée Bathilde, femme très vertueuse et de grand courage, que les Français avaient prise dans une irruption qu’ils avaient faite au-delà du Rhin, et que l’auteur de sa vie dit avoir été d’une naissance illustre parmi les Saxons.

Sigebert, plein de religion, mais peu actif, laissa tout faire à Pépin, dont l’autorité fut si grande, que sa maison s’éleva bientôt au-dessus des autres; de sorte que son fils Grimoalde eut assez de crédit pour conserver cette charge après la mort de son père. Elevé à un si haut point, il crut encore pouvoir aspirer à la royauté, et obtint de Sigebert, tant il avait de pouvoir sur son esprit, qu’encore qu’il fût fort jeune et marié depuis peu, il adoptât son fils Childebert. Depuis cette adoption, Sigebert eut un fils, nommé Dagobert, qu’il recommanda en mourant à Grimoalde, et le laissa en sa garde. Mais quand ce prince fut un peu grand, Grimoalde le fit enlever et conduire en Irlande, que les auteurs de ce temps-là nommaient Scotia. Et comme il était maître des affaires, il plaça son fils sur le trône (653). Les seigneurs austrasiens ne purent souffrir cet attentat : ils dépossédèrent le nouveau roi Childebert, que Grimoalde avait voulu établir, et le menèrent lui-même à Clovis, qui le fit enfermer en prison à Paris, où il mourut. Ils ne rappelèrent pourtant pas Dagobert, fils de Sigebert; mais ils se soumirent à Clovis, qui par ce moyen eut le royaume de France tout entier.

 

CLOTAIRE III. (An 656.)

Clovis laissa trois fils : Clotaire, Childéric et Thierri. Le preuiier succéda d’abord seul aux Etats de son père ; mais en 660 Childéric fut élu roi d’Austrasie; ces princes étaient encore en bas âge; et le troisième nommé Thierri, qui était au berceau, n’eut point de partage. Bathilde, mère des rois, gouvernait avec beaucoup de prudence et de justice. Ebroin fut maire du palais en Neustrie. C’était un homme adroit et vaillant, qui sut cacher son ambition et sa cruauté naturelle, par la crainte qu’il avait de déplaire à la reine : il répondit parfaitement à ses sages desseins, et servait très bien sous ses ordres. En ce même temps, Sigebrand fut appelé à la cour, et élevé à l’épiscopat par la protection de la reine, dont il avait gagné les bonnes grâces par la sagesse de sa conduite.

Ebroin qui se conformait à l’humeur et aux inclinations de cette princesse, fit semblant d’être ami de Sigebrand, jusqu’à ce que la vanité de cet homme fît qu’il laissa mal interpréter la bonté que la reine avait pour lui. Ebroin se servit de ce soupçon pour la ruine de l’un et de l’autre. Sigebrand fut tué par ses ennemis, dont Ebroin se déclara le protecteur. Ceux-ci allèrent ensuite à la reine, et lui conseillèrent de se retirer dans l’abbaye de Chelles, qu’elle avait fondée avec une magnificence royale. Elle entra sans peine dans ce dessein : Ebroin devint le maître de tout, et ses vices, mal couverts, commencèrent alors à se déclarer. Haï de tout le monde, il éloigna de la cour tous les seigneurs, et leur défendit d’y venir sans être mandés. Clotaire III, étant venu à mourir sans enfants, Ebroin appela au royaume Thierri, sous le nom duquel il prétendait régner. Il fit ce choix lui seul, sans appeler les seigneurs à la délibération, et il renouvela les défenses de venir à la cour sans ordre. Les seigneurs de Neustrie se joignirent à ceux d’Austrasie pour mettre Childéric sur le trône, et ayant pris Ebroin au dépourvu, ils le firent moine dans le couvent de Luxeuil et jetèrent Thierri dans celui de Saint-Denis.

 

Commentaire de la Rédaction

Pour le meilleur et pour le pire les coutumes païennes ont la vie dur : la polygamie, signe de puissance et de fertilité dans un monde païen, reste habituelle et le partage du Royaume une évidence – au point que le roi qui ne s’y pliepas se heurete à l’incompréhension générale.

La sainteté pourtant fait son chemin, et la morale chrétienne, si elle n’est pas encore infusée dans les institutions, devient la règle à suivre ; l’autorité de l’Eglise et la foi devenant les références.

Le méchant Ebroin sait ainsi avancer cacher, et les rois qui se laissent aller à l’excès, comme Dagobert, s’amendent et se rachètent à la fin de la vie.

La sainte Bathilde, autre femme virile, fait de son mieux pour bien gérer le royaume malgré l’ambition des maires du palais et les divisions. Elle accueillera avec joie la proposition du perfide Ebroin de se retirer dans un monastère : quelle bonheur pour cette femme de pouvoir enfin se consacrer à Dieu. Ebroin néanmoins était vicieux, et son vice éclate au grand jour avec le pouvoir : il va se faire évacuer par les grands seigneurs. La féodalité naissante a du bon : où sont les seigneurs pour évacuer les présidents de la République tous plus vicieux les uns que les autres, sans même s’en cacher ! Quand un gouvernant exagère dans les oeuvres contre-nature, tout le monde s’en rend compte : il faut simplement des seigneurs puissants pour pouvoir agir comme têtes des corps intermédiaires pour faire cesser les abus les plus saillants.

Bossuet nous rappelle combien l’éducation est essentielle, et combien elle est attaquée par les méchants – ici Ebroin- pour pervertir, et ainsi rendre manipulable, les rois.

Nous apprenons incidemment que l’allégeance de la Bretagne à la France date déjà de cette époque : l’ère mérovingienne fonde véritablement la France dans toutes ses parties. La création de Saint-Denis le démontre encore.

Notons aussi au passage que quand plusieurs rois règnent l’un sur la Neustrie, l’autre sur l’Austrasie, Bossuet place dans la succession légitime le roi de Neustrie, sachant bien que l’Ouest représente le coeur du royaume de Francs, et l’ancêtre de notre France.

 


Listes des précédents article: (1) (2) (3) (4)

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.