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Troisième sermon sur la petite voie de sainte Thérèse : les dispositions du cœur pour aimer Dieu en vérité

 

Cette semaine, nous célébrions la fête de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Aujourd’hui, dans la continuité de mes deux sermons précédents, je vous parlerai encore de son enseignement sur la voie de la sainteté, qu’on appelle plus communément la « Petite Voie ».

D’abord nous avons parlé de l’amour miséricordieux que Dieu a pour nous et qu’Il nous a révélé. Ainsi Saint Paul dit : « Dieu qui est riche en miséricorde, et à cause de l’immense amour dont il nous a aimés, lorsque nous étions morts par nos péchés, nous a vivifiés en Jésus-Christ. » (Eph 2 ;4-5). Ensuite nous avons parlé de la conséquence de notre Foi en l’amour miséricordieux de Dieu, c’est-à-dire le désir d’aimer Dieu. Ainsi Saint Jean dit : « Nous donc, aimons Dieu, puisqu’Il nous a aimé le premier. » (1 Jn 4 ;19). Aujourd’hui je vous parlerai des dispositions du cœur que le désir d’aimer Dieu nous conduit à développer afin d’aimer Dieu en vérité. Ces dispositions sont l’humilité et la confiance en l’amour de Dieu.

L’humilité

Dieu nous aime d’un amour miséricordieux. Cela signifie que son amour pour nous est motivé par notre petitesse et notre faiblesse. Plus on est petit et faible, plus on attire sur soi l’amour miséricordieux de Dieu. Ne soyons pas étonnés de cela, car même entre nous les hommes, il en va ainsi : plus un enfant est petit et vulnérable, plus il est l’objet d’attention, de protection et d’amour de la part de ses parents. Dieu mentionne cette réalité quand Il dit dans la Bible: « Si quelqu’un est tout petit, qu’il vienne à moi ! » (Pr 9 ;4). Et puis :

« Comme une mère caresse son enfant, ainsi je vous consolerai, je vous porterai sur mon sein et je vous balancerai sur mes genoux ! » (Is 66 ;13).

Si donc nous voulons bénéficier de l’amour de Dieu, nous devons nous faire tout petits et nous complaire dans notre petitesse. Cela veut dire que nous devons être contents d’être des créatures faibles complétement dépendantes de Dieu, des créatures misérables qui ne possèdent rien par elles-mêmes, des créatures incapables de faire quoique ce soit sans l’aide de Dieu. Plus nous nous faisons petits spirituellement, plus nous avons droit à l’amour miséricordieux de Dieu. Au contraire, plus nous voulons être puissants et indépendants selon nos propres forces, moins nous avons droit à l’amour miséricordieux de Dieu. Voyez le privilège des petits enfants. Un petit enfant a le privilège de pouvoir se blottir dans les bras de sa mère, en raison même de sa petitesse. Mais en grandissant, c’est-à-dire en perdant sa petitesse, il perd son privilège. Ainsi en est-il de nous. Vouloir sortir du sentiment de sa misère, c’est sortir de l’amour de Dieu.

Pour bénéficier de l’amour de Dieu, notre effort doit donc consister à voir notre misère, l’avouer avec simplicité et à s’y complaire paisiblement. Pourquoi est-ce un effort ? Parce que nous sommes profondément orgueilleux. Nous voulons être forts en quelque manière par nos propres forces ; nous ne voulons pas être l’objet de la pure miséricorde de Dieu. Depuis le péché originel, le « non serviam » (« Je ne servirai pas ») de Lucifer résonne au plus
profond de notre âme. C’est ce que Saint Jean appelle « l’orgueil de la vie » (1 Jn 2 ;16). Dans nos désirs de perfection même, presque inconsciemment, nous nourrissons la secrète prétention de devenir quelqu’un de remarquable. Dès lors, l’amour de Dieu cesse de se déverser sur l’âme car il se butte à un obstacle : notre orgueil.

Concrètement dans notre vie quotidienne, comment attirer sur nous l’amour miséricordieux de Dieu par le moyen de notre petitesse ? En nous tournant paisiblement vers Dieu et nous abandonnant à Lui avec confiance à chaque fois que nous constatons notre petitesse et notre misère en raison de nos incapacités, échecs, imperfections, et péchés.

Ne pas se mettre en colère contre soi-même, ne pas se troubler, ne pas se décourager. Toutes ces attitudes ont leur source dans l’orgueil. Rappelez-vous que, sur ce sujet, les enfants sont nos modèles. Or que fait un petit enfant qui n’arrive pas à réaliser quelque chose à cause de sa faiblesse ? Il court tout simplement vers son papa pour lui demander de faire la chose à sa place. Ainsi devons-nous faire : admettons paisiblement nos incapacités et faiblesses
et tournons-nous avec confiance vers notre Père du Ciel pour qu’Il nous vienne en aide. De la même façon, il faut se tourner vers Dieu paisiblement et s’en remettre à lui avec confiance en son amour à chaque fois que nous subissons de la part des autres des jugements négatifs, du mépris, des injustices, de l’oubli, et toutes choses qui nous rabaissent. Ces situations nous aident puissamment à prendre conscience de notre petitesse. Donc ne pas se mettre en colère contre les autres, ne pas se troubler, ne pas se laisser abattre par la tristesse.

Regardons encore les petits enfants, nos modèles en la matière. Avez-vous déjà vu ce que font certains petits enfants qui ont un chagrin ? Sans pleurer ni même se plaindre, ils vont trouver leur mère pour qu’elle les prenne dans ses bras ; ils se reposent un moment ainsi sur son cœur pour se consoler au contact son amour ; puis ainsi consolés, ils repartent jouer. Voilà ce que nous devons faire avec notre Père du Ciel dans les épreuves de notre vie. Jésus n’a-t-il pas dit dans l’Évangile : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et ployés sous le fardeau, et je vous soulagerai. » (Mt 11 ;28). Le désir d’aimer Dieu nous pousse à nous faire petits, toujours plus petits, afin d’être rempli toujours plus de l’amour de Dieu.

La confiance

Vous l’avez compris de ce qui précède : le sentiment de sa propre misère va toujours avec une confiance illimitée en l’amour miséricordieux de Dieu. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus disait : « La sainteté consiste en une disposition du cœur qui nous rend humbles et petits entre les bras de Dieu, conscients de notre faiblesse et confiants jusqu’à l’audace en sa bonté de Père. » L’humilité nous fait nous détourner de nous-mêmes, et la confiance nous fait nous jeter dans les bras de notre Père du Ciel. Nous ne sommes rien par nous-mêmes, mais Dieu est l’Être infini ; nous sommes faibles, mais Dieu est tout-puissant ; nous manquons de toutes les perfections, mais Dieu les possède toutes infiniment. Et Dieu nous aime. Et Dieu veut se donner à nous avec toute sa puissance et ses perfections, pour autant qu’on le laisse entrer en notre âme. Ainsi notre faiblesse même nous rend puissants. Cela et cela seul explique comment les martyrs ont peu rester fidèles malgré les affreuses tortures auxquels ils étaient soumis. L’humilité, aimer sa petitesse comme on l’a expliqué, ne rend pas pusillanime. Car la contrepartie de l’humilité, c’est la confiance en l’amour miséricordieux de Dieu, et cette confiance rend capable d’accomplir n’importe quelle mission que Dieu pourrait demander. C’est ainsi, sans présomption aucune, Saint Paul écrivait aux Romains :

« Qui nous séparera de l’amour du Christ ?… J’ai l’assurance que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni les choses présentes, ni les choses futures, ni les choses à venir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu dans le Christ Jésus » (Rom 8 ; 35-39).

Dans son autobiographie, Sainte Thérèse raconte un fait qui illustre comment l’humilité et la confiance en Dieu permettent d’accomplir les tâches les plus difficiles. Dans un monastère, la charge de maître des novices est très importante car il s’agit de former les novices à la vie religieuse et de les guider dans les voies spirituelles ; car l’avenir du monastère dépend en grande partie de la bonne formation des novices. Il faut donc beaucoup de prudence, de
discernement et de charité pour pouvoir assurer la charge de Maître des novices. Or la Supérieure du Carmel donna la charge de Maîtresse des novices à Thérèse. Elle n’avait que 22 ans. Voici ce que dit Sainte Thérèse à ce sujet :

« Lorsqu’il me fut donné de pénétrer dans le sanctuaire des âmes, je vis tout de suite que la tâche était au-dessus de mes forces, alors je me suis mise dans les bras du bon Dieu, comme un petit enfant et cachant ma figure dans ses cheveux, je Lui ai dit: « Seigneur je suis trop petite pour nourrir vos enfants ; si vous voulez leur donner par moi ce qui convient à chacune, emplissez ma petite main et sans quitter vos bras, sans détourner la tête, je donnerai vos trésors à l’âme qui viendra me demander sa nourriture »… jamais mon espérance n’a été trompée, le Bon Dieu a daigné remplir ma petite main autant de fois qu’il a été nécessaire pour que je nourrisse l’âme de mes sœurs. » (chap. 11).

Voilà comment Sainte Thérèse, en se faisant toute petite par l’humilité et la confiance en Dieu a pu remplir parfaitement bien une charge très difficile.

Conclusion

Chers amis, la conclusion est bien simple. Si nous voulons aimer Dieu, mettons en pratique l’humilité et la confiance en l’amour miséricordieux de Dieu, comme Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus nous l’a enseigné. Amen.

Un prêtre missionnaire au Japon

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