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À propos du “petit Saint-Denis” slovène, par M. l’abbé Stollsteiner. Lettre mensuelle aux membres et amis de la Confrérie Royale

Avec mes parents en juin dernier nous avons décidé de faire un tour de la côte croate en voiture. Un road trip comme on dit dans le jargon moderne. Partant de ma paroisse en Suisse, nous sommes passés par Trieste, mais j’ai voulu m’arrêter à Nova Gorica pour enfin aller voir ce site si connu d’un certain milieu mais en même temps trop méconnu du grand public : le mausolée des derniers Bourbons dans le couvent franciscain de la ville (Francskanski samostan Kostanjevica v Novi Gorici), ce n’était pas un grand détour.

Il faut savoir que la ville de Gorizia avec Nova Gorica, où se trouve le monastère franciscain, ne fut à l’époque qu’une seule ville dans la même région géographique. Maintenant une partie de la ville, la plus ancienne, est en Italie (Gorizia, ou Görz en allemand) tandis que l’autre partie, plus nouvelle et moderne est en Slovénie. Ainsi il fut un temps où la ville n’était pas partagée et le monastère franciscain appartenait à la ville de Gorizia. 

Quand on arrive au monastère, il n’y a (malheureusement) pas d’indication spéciale. Même le monastère en lui-même n’est pas bien indiqué. 

On monte une route qui serpente et qui nous fait arriver sur les hauteurs de la ville. Il y a un parking et on peut admirer de là la ville nouvelle, mais aussi la ville ancienne de Gorizia avec son château médiéval qui se trouve sur une butte. C’est comme une sorte de plaine en contrebas.  

Nous marchons et montons encore quelques marches jusqu’au parvis de l’église conventuelle. Nous décidons avant tout d’aller voir « l’Hôte des lieux » avant les autres hôtes, n’étant plus de ce monde. 

L’église est très belle et baroque comme toutes les églises aux alentours (ou presque). Ce baroque autrichien et d’Allemagne du sud typique de ces régions où régna la famille des Habsbourg. 

Nous faisons le tour et remarquons un grand panneau explicatif sur la crypte et le mausolée de nos derniers rois et princes. Il est écrit que les visites sont sur rendez-vous ou sur demande. Je devais aussi célébrer la messe donc cela tombait bien. Il va falloir demander à la porterie. Nous allons donc sonner, et après plusieurs sonneries un franciscain en habit et avec une grande barbe grise nous ouvre. Il ne parle presque pas le français. Nous parlons donc l’anglais car il semble plus à l’aise avec cette langue. Nous lui expliquons que nous venons de France et voudrions voir la Crypte. Il nous indique juste le chemin. 

Nous descendons plusieurs escaliers et arrivons devant la Crypte. Rien de spécial. Une salle aux murs blancs avec quelques explications sur le mur latéral et un escalier de quelques marches qui montent dans le mausolée.  

Nous voilà devant cette crypte que nous avions souvent vue en photo et que nous avions maintenant devant nos yeux. Nous montons l’escalier et nous voici devant l’Histoire de France. Dans les tombeaux reposent les derniers membres de la famille royale française des Bourbons directs. Exilés par la révolution de 1830, ils trouvèrent un premier refuge à Édimbourg, en Écosse. Ensuite ils partirent pour Prague et finalement, arrivèrent à Gorizia où ils devinrent les hôtes du comte Coronini. Ils furent enterrés au monastère de Kostanjevica. C’est pourquoi ce lieu est aujourd’hui connu dans le monde comme le « petit Saint-Denis ».

Mais qui se trouve en réalité dans cette Crypte ? 

Au centre se trouve le tombeau surélevé du roi Charles X. Suite à son abdication en 1830, le roi s’est d’abord retiré au palais d’Holyrood en Écosse. Puis grâce à ses bonnes relations avec les Habsbourg, il s’installe dans l’empire, séjournant à Prague ou encore à Gorizia, ville dans laquelle il est décédé du choléra le 6 novembre 1836. C’est là qu’il fut inhumé, dans le couvent franciscain édifié sur un sanctuaire ancien et centre d’un pèlerinage. 

À gauche, repose Louis-Antoine d’Artois, duc d’Angoulême, devenu Louis XIX après la mort de son père… Au décès de son père, en effet, Louis-Antoine de France devient l’aîné des descendants de la famille selon la tradition de primogéniture mâle, et ainsi Roi de jure jusqu’à sa mort. Il est décédé à Gorizia le 3 juin 1844 et fut inhumé aux côtés de son père.

À droite de Charles X, repose Marie-Thérèse de France, « Madame Royale », née le 19 décembre 1778 à Versailles, fille aînée du roi Louis XVI et de la reine Marie Antoinette d’Autriche. Le 10 juin 1799, en épousant son cousin germain Louis, elle devient duchesse d’Angoulême puis dauphine de France, puis en exil comtesse de Marnes et Reine de France. Elle est décédée au château de Frohsdorf en Autriche le 19 octobre 1851 et est inhumée aux côtés de son époux et de son oncle et beau-père.

Sur le côté gauche de la crypte, se trouve le tombeau d’Henri d’Artois, duc de Bordeaux, puis comte de Chambord (en exil), fils de Charles-Ferdinand d’Artois, duc de Berry et neveu du duc d’Angoulême. Après les morts successives de Charles X et de Louis XIX, il devient Henri V. Il est décédé au château de Frohsdorf en 1883 et fut inhumé dans ce panthéon des Bourbons en exil. Son épouse Marie Thérèse d’Autriche-Este repose à ses côtés depuis 1886.

Le dernier tombeau, différent des précédents, est celui de Louise d’Artois, sœur du comte de Chambord, décédée en 1864. À noter qu’ayant épousé Charles III, duc de Parme, elle est la mère de Robert Ier, duc de Parme et la grand-mère d’une nombreuse descendance, dont Zita, impératrice d’Autriche…

Nous nous recueillîmes un instant et avions, devant ces tombeaux, l’occasion de prier aussi pour la France qui en a bien besoin. Je fus ensuite conduit à la sacristie afin de célébrer la messe et prier pour ceux qui reposent en dessous de l’église conventuelle. Ce fut une réelle joie et un véritable honneur. Je recommande à tous de passer au couvent franciscain de Nova Gorica, la région en vaut aussi le détour. 

Abbé Hubert Stollsteiner
 Curé administrateur

Pour information : une association avait été créée, hors de tout mandat royal, militant pour le rapatriement à la basilique de Saint-Denis, depuis la Slovénie, des cendres de nos rois de France et princes morts en exil. Sa Majesté le Roi Louis XX, lors du pèlerinage qu’Elle a Elle-même effectué sur les tombes de ses prédécesseurs morts en exil, a clairement exprimé, en sa qualité de chef de maison, qu’il ne convenait pas — en l’état actuel des choses — que leurs cendres reviennent à Saint-Denis

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