Vie des royalistes

L’héraldique capétienne : la branche aînée de la maison de Bourbon (2ème partie)

La première ligne actuelle de la branche aînée de la maison de Bourbon, issue comme on l’aura compris du roi Alphonse XIII d’Espagne (devenu chef de nom et d’armes en 1936 après la mort du dernier prétendant carliste), a également comporté le fils cadet du roi cité, l’infant don Juan de Bourbon (qui a pris le titre de comte de Barcelone à partir du 8 mars 1941) et comporte aujourd’hui les descendants de ce dernier. Son fils aîné est le roi d’Espagne don Juan Carlos Ier.

Don Juan de Bourbon et Battenberg (sa mère, épouse d’Alphonse XIII, étant Victoire Eugénie, princesse de Battenberg, petite-fille de la reine Victoria de Grande-Bretagne) est né le 20 juin 1913 et décédé le 1er avril 1993. Il n’a renoncé à ses droits à la couronne d’Espagne que le 4 mai 1977 (non sans beaucoup de réticence et de conflits familiaux), alors que son fils Juan Carlos était déjà roi d’Espagne depuis 1975. Il a quasiment toujours porté les grandes armes d’Espagne (issues de la période des Habsbourg et modifiées après l’arrivée des Bourbon) et telles qu’elles furent recomposées en 1924 : parti d’un trait et coupé de deux; au I parti : au1) écartelé en sautoir d’or à 4 pals de gueules et d’argent à l’aigle de sable, becquée et membrée de gueules, couronnée d’or (rois de Sicile de la maison d’Aragon), au 2) d’argent à la croix potencée d’or, cantonnée de 4 croisettes du même (Jérusalem); au II parti : au 1) de gueules à la fasce d’argent (Autriche), au 2) d’azur semé de fleurs de lys d’or, à la bordure componnée d’argent et de gueules (issu de France des ducs de Bourgogne de la seconde lignée); au III d’or à six fleurs de lys d’azur rangées 1, 2, 2 et 1 (Farnèse pour Parme); au IV d’or à 6 boules (tourteaux) rangées 1, 2, 2 et 1, la supérieure d’azur à 3 fleurs de lys d’or, les 5 autres de gueules (Médicis pour Toscane); au V bandé d’or et d’azur de 6 pièces, à la bordure de gueules (ducs de Bourgogne de la première lignée), taillé-ployé d’or au lion de sable, armé et lampassé de gueules (Flandre); au VI de sable au lion d’or armé et lampassé de gueules (Brabant), tranché-ployé d’argent à l’aigle de gueules, becquée, membrée, couronnée et les ailes liées d’or (Tyrol); sur le tout un écu aux petites armes d’Espagne : écartelé, au 1) de gueules au château donjonné de 3 tours d’or, maçonné de sable, ouvert et ajouré d’azur (Castille), au 2) d’argent au lion de pourpre (ou de gueules), armé, lampassé et couronné d’or (Léon), au 3) d’or à 4 pals de gueules (Aragon), au 4) de gueules à la chaîne d’or passée en croix, en sautoir et en orle, chargée en cœur d’une pierre de sinople (Navarre), enté en pointe d’argent à la grenade de gueules, tigée et feuillée de sinople (Grenade); sur le tout du tout, un écu d’azur à 3 fleurs de lys d’or, à la bordure de gueules (issu de Philippe de France, duc d’Anjou). L’écu est timbré de la couronne royale espagnole et entouré du collier de la Toison d’or (on ne sait pourquoi celui de l’ordre de Charles III, qui figurait antérieurement, a disparu des compositions héraldiques espagnoles bien qu’un décret royal du 4 août 1983 précise que cet ordre reste la plus haute décoration civile espagnole). Voici un bel exemple de ce que l’on nomme aussi un penon (composition héraldique aux armes des différentes alliances du possesseur).

Sa Majesté le roi d’Espagne don Juan Carlos Ier est le fils aîné (vivant) du comte de Barcelone et de la princesse Maria de las Mercedes de Bourbon Deux-Siciles. Il fut désigné pour succéder au chef de l’Etat espagnol en 1969 et proclamé roi d’Espagne le 22 novembre 1975 après la mort du Général Francisco Franco. Le roi Juan Carlos a épousé le 14 mai 1962 Son Altesse Royale Sofia, princesse de Grèce, fille du roi Paul Ier et de la reine Frederica. Le couple a trois enfants vivants : le prince Felipe, prince des Asturies, la princesse Elena et la princesse Cristina. Les armoiries du roi Juan Carlos ont été réglées par un décret royal du 21 janvier 1977 et sont les suivantes : écartelé, au 1) de gueules au château donjonné de 3 tours d’or, maçonné de sable, ouvert et ajouré d’azur (Castille), au 2) d’argent au lion de pourpre (ou de gueules) armé, lampassé et couronné d’or (Léon), au 3) d’or à 4 pals de gueules (Aragon), au 4) de gueules à la chaine d’or passée en croix, en sautoir et en orle, chargée en cœur d’une pierre de sinople (Navarre), enté en pointe d’argent à la grenade de gueules, tigée et feuillée de sinople (Grenade); sur le tout un écu d’azur à 3 fleurs de lys d’or, à la bordure de gueules (issu de Philippe de France, duc d’Anjou). Il s’agit là de ce que l’on appelle les “petites armes d’Espagne” (cf. ci-dessus). On remarquera que l’écu dit de Bourbon en Espagne qui figure sur le tout est bien aux armes d’Anjou et non pas de France (qui n’appartiennent qu’au chef de maison, le prince Louis-Alphonse de Bourbon), comme l’exigent les règles héraldiques. L’écu est timbré de la couronne royale d’Espagne (à 8 fleurons, fermée par 8 arches dont 5 visibles, sommée d’un globe d’azur cerclé et croiseté d’or, comblée d’un bonnet de gueules) et entouré du collier de la Toison d’or (dont le roi Juan Carlos est chef et souverain grand maître), sans celui de Charles III. De façon très significative, cet écu est posé sur deux bâtons écotés de gueules passés en sautoir (dits “croix de Bourgogne”) et qui évoquent la tradition carliste dont l’héritage échut au plan historique au roi Alphonse XIII après la disparition du dernier roi carliste en 1936. De même, la pointe de l’écu est accostée de la double devise des rois catholiques : à dextre le joug et à senestre le faisceau de 5 flèches, le tout de gueules et lié du même. Nous observerons, en passant, que la devise des rois catholiques fut également l’emblème du Mouvement national espagnol à l’époque du général Franco.

Le roi Juan Carlos a deux sœurs. La première est duchesse de Badajoz. La seconde est duchesse d’Hernani (par héritage de Manfred de Bourbon, dernier duc d’Hernani) et de Soria, attribué par son frère. Nous ne leur connaissons pas de règlement officiel d’armoiries mais elles portent toutes deux des armes officieuses en rapport avec leur lignée mais aussi leurs titres (chacune se distinguant par un lambel d’argent chargé de petits meubles différents –comme le font les cadets de la maison royale de Grande-Bretagne-, posé sur les armes du royaume)*. Sachant qu’elles peuvent porter, comme cela est de coutume, les armes de leurs époux, Son Excellence Luis Gomez-Acebo, vicomte de la Torre pour la première, Son Excellence Carlos Zurita pour la seconde.

Des trois enfants du roi Juan Carlos et de la reine Sofia seul le prince des Asturies a reçu un règlement d’armoiries par décret royal du 16 mars 2001. Il porte, comme son père, un écu aux petites armes d’Espagne chargé en cœur des armes d’Anjou mais avec un lambel d’azur à 3 pendants brochant sur la partition. L’écu est timbré d’une couronne à 8 fleurons, fermée par 4 arches dont 3 visibles, sommée d’un globe d’azur cerclé et croiseté d’or, comblée d’un bonnet de gueules. Il est entouré du collier de la Toison d’or.

Comme dans notre précédent article consacré à l’héraldique capétienne, pour ce qui concerne les ordres du roi, il nous faut dire quelques mots de l’ordre de la Toison d’or. Autrement appelé “ordre illustre de la Toison d’or”, il fut fondé le 10 janvier 1429 par le duc de Bourgogne Philippe le Bon pour récompenser ses plus fidèles et hardis compagnons. L’une des principales conditions pour l’admission au sein de l’ordre était l’appartenance à la foi catholique. La maîtrise appartenait aux ducs de Bourgogne actuels et à venir ce qui explique qu’à la mort du dernier duc capétien, Charles le Téméraire, l’ordre fut transféré par sa fille unique Marie à son époux, Maximilien de Habsbourg et ainsi à l’aîné de la maison d’Autriche. Lorsque Charles Quint devint roi d’Espagne, la maîtrise de l’ordre suivit sa destinée jusqu’au plus proche héritier des Habsbourg d’Espagne, Philippe de France, duc d’Anjou, devenu Philippe V. Celui-ci lia à jamais la maîtrise de l’ordre de la Toison d’or à la couronne d’Espagne. Cette appartenance de l’ordre au roi d’Espagne fut toujours reconnue par les souverains successifs de France, jusqu’à Henri V, comte de Chambord. Il faut savoir cependant que les statuts de cet ordre ont considérablement changé depuis le XIXème siècle, permettant en particulier d’y recevoir des femmes mais aussi d’importants personnages du monde politique (devenant ainsi un simple ordre de mérite), qu’ils soient catholiques ou qu’ils ne le soient pas ! Feu le roi Hussein de Jordanie ou M. Nicolas Sarkozy furent ainsi faits chevaliers de la Toison d’or… Autres temps, autres mœurs.

Signalons qu’au décours de la succession d’Espagne, l’empereur d’Autriche refusa de reconnaître la transmission de l’ordre de la Toison d’or au roi Bourbon d’Espagne et en revendiqua la grande maîtrise. Depuis cette époque il existe donc deux ordres de la Toison d’or, l’espagnol et l’autrichien. Ce dernier a volontairement conservé ses caractères aristocratique et catholique. 

Collier de l’ordre de la Toison d’or

Nous aurons plus tard l’occasion de revenir sur les systèmes de brisure au sein des familles royales ou princières et nous montrerons leur intérêt général autant que particulier (pour les membres de la branche cadette, dite d’Orléans, de la maison de Bourbon, par exemple).

Jean-Yves Pons

La première partie de l’héraldique capétienne, publiée le 4 novembre 2013 sur Vexilla Galliae, est disponible sur ce lien : https://www.vexilla-galliae.fr/royaute/vie-des-royalistes/533-l-heraldique-capetienne-la-branche-ainee-de-la-maison-de-bourbon-1ere-partie

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