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Finissons-en avec l’hégémonie « scientiste » !

« Il faut ramener l’homme à l’étude des sciences morales, à la Théologie, à la philosophie à l’histoire; là s’ouvrent les grandes questions; là se tiennent les nobles idées, et sur leur seuil naissent les caractères. Il faut déplacer notre centre d’admiration. Comment avoir pu le fixer sur un vieux monde éteint qui recelait l’erreur et l’esclavage, ou même sur la matière étendue sous nos pieds, lorsque le christianisme a révélé les splendeurs du Ciel, lorsqu’il a fait mûrir les fruits de la nature humaine en attirant sur elle les grands rayons de l’Infini ? Pourquoi le scepticisme suit-il les pas des sciences physiques? sinon parce qu’elles nous distraient de la grande merveille, et qu’elles n’exercent dans l’homme que ses moindres facultés. »[1]

« Ces petites sciences ne nous prennent point d’assez haut, et d’ailleurs elles tournent les têtes. L’expérience apprend que la plupart des hommes n’ont pas assez d’étendue dans l’esprit pour se voir absorber par des sciences naturelles dont l’étude exclusive les porte à nier l’Ordre surnaturel. Notre siècle disait que de telles sciences élèvent la pensée et améliorent les nations il aurait bien dû le prouver. Nous voyons au contraire que lorsque cet esprit de science envahit tout, c’est la raison qui s’affaiblit et l’âme qui est mise à la porte. L’erreur, alors, est donnée pour la vérité, le mal est appelé le bien, la loi est déclarée athée et l’homme est souverain »[2]

Blanc de Saint-Bonnet concluait déjà à la fin du XIXème siècle sur les ravages du scientisme, qui fait des sciences dures matérialistes des idoles en supprimant vraie philosophie et bonne théologie, pour le plus grand malheur des hommes. Que dirait-il presque 150 ans plus tard ? Les mêmes principes entraînent les mêmes causes. Depuis que le monde roule sur les faux principes de 1789 fondés sur les lumières, il dérive de catastrophe en catastrophe et courre à sa perte. Plus personne n’oserait d’ailleurs nier la déchéance de notre siècle, même les plus progressistes, qui font tout pour ne pas identifier les causes, et plaident pour « plus de principes révolutionnaires » qui ne seraient pas assez appliqués : ou comment vouloir guérir un malade en inoculant encore plus du poison qui le tue…

Il ne s’agit pas de nier la science, il s’agit de la remettre à sa place dans ce monde qui en fait une idole absurde. Les sciences physiques ne servent qu’à mieux connaître la Création et ses merveilles, essentiellement du point de vue matériel. Rien de moins, certes, mais rien de plus non plus. A tout prendre, la science fournit des vérités bien pauvres et molles, puisque ces « vérités » ne sont en fait que des hypothèses montées en théorie, confirmées par les phénomènes observées jusqu’alors, mais appelées à être remises en cause par des phénomènes nouvellement observés qui contredisent la théorie. La science ne fournit ainsi jamais de vérité absolue, simplement des vérités relatives à un état de la connaissance des phénomènes donnés à un moment donné. La science ne fait que donner des représentations du monde matériel, qui ont leur valeur et leur pouvoir de suggestion, certes, mais ce n’est rien de plus et certainement pas l’idole que nous en faisons.

La Mathématique occupe certainement une place différente, aux frontières de la philosophie, qui fait prendre conscience des idées, de la divinité et de l’absolu.

La science ne devrait ainsi pas prendre plus de place que celle qui consiste à permettre de mieux comprendre la Création, fournissant une vérité bien pauvre puisque simplement hypothétique, et si limitée puisqu’essentiellement matérielle.

La philosophie est la discipline qui se trouve au-dessus des sciences dures. Pas « les philosophes des lumières » évidemment, qui sont tous sauf des philosophes, et qui font tout sauf de la philosophie – ils mériteraient à peine le qualificatif de sophistes, car ces derniers au moins se fourvoyaient avec bonne foi. Non, nous parlons de la vraie philosophie, celle des anciens antiques, celle des scolastiques, bref, celle qui s’intéresse à l’essence des choses et aux vérités universelles et absolues sur la nature humaine. Elle se fonde sur la raison pour aboutir à des certitudes sur des vérités universelles concernant la nature humaine et la nature des choses – dont Dieu. Elle est bien plus humaine que les sciences dures, si mécaniques, si analytiques : à l’opposé, la philosophie consacre toute la noblesse et la spécificité de l’intelligence humaine qui consiste à saisir l’essence des choses, et non pas à simplement analysé les données – ce que fait l’ordinateur.

Son domaine de prédilection est certainement la métaphysique, puis les sciences morales. Ses outils de réflexion sont l’expérience humaine, et donc l’histoire a un rôle clef et central, mais aussi le droit, la politique et la morale. Quand Aristote disait « l’homme est un animal social », voilà de la philosophie, avec une vérité universelle et certaine démontrée par la raison naturelle.

Enfin, tout en haut de la hiérarchie de nos sciences, voici la théologie, cette science de Dieu, cette science mettant en œuvre la raison « surnaturelle », la raison éclairée par la Foi. La Théologie, en un certain sens, part des conclusions de la philosophie dans certains cas, conclusions qu’elle ne démontre pas mais qu’elle prend comme axiomes, à la différence de la philosophie : toute la Révélation devient l’axiome, et toutes les vérités philosophiques précédemment démontrées sont révélées (et d’autres encore qui ne pouvaient pas être démontrés ni connus par la raison naturelle). Mais la Révélation contient bien plus que les conclusions philosophiques atteignables par la raison humaine : elle contient toutes les vérités surnaturelles, dont celle sur Dieu et notre Salut, tout autant de vérités qui ne peuvent pas être atteintes par la raison humaine. Et là se trouve toute la noblesse de cette discipline : prenant les axiomes de la Révélation, notre raison éclairée par la Foi peut s’appliquer justement à ces axiomes pour aboutir à des conclusions universelles, absolues et surnaturelles. Par exemple : les corps ressusciteront à la fin des temps, le Verbe s’est incarné, nos corps sont les temples de l’Eucharistie, donc il faut prendre soin de nos corps qui ont une importance capitale pour notre salut. Voilà une conclusion théologique, qui vient confirmer le sentiment naturel universel qui consiste à dire qu’il est important de prendre soin de la santé, mais en l’éclairant à la lumière de la foi, en le remettant dans l’ordre de salut : avoir un corps sain, pour obtenir une âme sainte, ce qui n’empêche pas, au contraire, la Passion nécessaire au Salut.

La société révolutionnaire est ainsi bien abrutie (au sens propre), réduisant l’homme à sa part animal. C’est une régression sans précédent : les sociétés païennes étaient bien plus civilisées en ce sens, car elle connaissait la philosophie et savaient que l’homme était foncièrement spirituel. C’était un temps très humain. Notre temps contemporain est absolument un enfer comparé aux temps de la royauté très chrétienne, dans laquelle la théologie est venue purifier de ses erreurs la philosophie païenne, et élever l’homme au monde de la grâce, divinisant ainsi l’homme grâce au sacrifice du Dieu qui est descendu en nous. Le Moyen—Âge était véritablement un âge divin. Nous sommes aujourd’hui à l’âge animal.

Alors travaillons à remettre déjà en nous les choses à leur place et dans l’ordre : théologie d’abord, philosophie ensuite et sciences en dernier. Foi et Raison. L’animal en nous soumis à l’homme en nous soumis au Dieu que nous recevons en nous lors de la Communion.

Le Roi Très Chrétien fait la jonction en France entre le naturel et le surnaturel, le temporel et le spirituel, le spirituel et la grâce, répandue par les clercs de notre Sainte Mère l’Eglise. Assurant ainsi l’ordre naturel pour mieux conquérir dans l’ordre surnaturel le salut alors acquis par toute une société.

Tout le contraire de la société révolutionnaire qui encense l’animal dans l’homme, affirme le mal comme bien, détruit la théologie, puis la philosophie, puis même la science pour fonder une société qui jette en masse les âmes dans les profondeurs infernales de la géhenne.

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France

Paul-Raymond du Lac

 

[1] A Blanc de Saint-Bonnet, La Légitimité, Casterman, Tournai, 1873, p.258

[2] Ibid, p.158

2 réflexions sur “Finissons-en avec l’hégémonie « scientiste » !

  • PELLIER Dominique

    Attention aux fautes !! “Il va de catastrophes en catastrophes et courre à sa perte” le verbe courir : il donne il COURT à sa perte

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  • Ce M. du Lac semble perdre de vue la raison pour laquelle toutes les philosophies et toutes les religions sont considérées comme de simples opinions au regard de la science, qui, elle, apparaît nimbée par l’aura de la vérité: c’est la confirmation par ses applications qui, à tort ou à raison, paraissent prolonger la vie des hommes et diminuer sa peine. Tant que l’on ne répond pas à cette question, il ne sert à rien de plaider pour le retour à la Juste Ethique et à la Philosophia Perennis.

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