Societé

Défendre la liberté d’expression : un droit mortel

Nous avions prévu d’écrire quelques lignes sur les victimes des terroristes qui viennent d’être abattus. Ces dessinateurs talentueux n’étaient pas des enfants de chœur, mais des défenseurs (à tout prix, y compris celui de la vie) de la liberté d’expression. Ils n’avaient d’autre ambition que de réveiller les consciences. On aimait ou non Charlie. On avait même le droit de le détester. Personne n’a jamais été obligé de le lire ou de l’acheter. Si les pratiquants de toutes les religions, toutes, sans exception, aimaient leur prochain, se montraient charitables, aimables, généreux, exemplaires dans leur comportement quand ils exercent une fonction au sein d’une église, ou d’un temple, ou autre, il n’y aurait pas de Charlie Hebdo. Ce n’était qu’un journal satirique, l’esprit d’une France, qui ne s’en laisse pas conter.

Personnellement, j’ai souvent honte de voir comment certains fidèles se comportent au quotidien et combien certains excès sont plus que condamnables et devraient mener en prison ceux qui en sont coupables. Ne cherchez pas dans votre mémoire : même les journaux dits conservateurs, ou de droite, en ont parlé. Il semblerait même que l’on oublie qui ils étaient, ces provocateurs. Alors, en quelques lignes, je souhaite seulement le rappeler et demander de prier pour eux, de leur offrir le silence réparateur auquel ils ont droit pour leur courage et leur liberté d’expression, l’une des valeurs les plus sûres de la France. Du respect, de la considération, de l’admiration pour toutes les victimes tuées à bout portant par des malades mentaux, des déséquilibrés, pas des islamistes radicaux, les tueurs ne sont que des barbares, sans aucun rapport avec l’Islam. Dessinateurs, policiers et autres accompagnateurs dans la mort méritent notre amour et plus.

Charb, Stéphane Charbonnier, 47 ans,  directeur de la publication de l’hebdomadaire satirique depuis mai 2009 et le départ de son prédécesseur, Philippe Val, avait été dessinateur pour L’Echo des savanes, Télérama, L’Humanité et Fluide glacial. Il y signait une rubrique satirique appelée “La fatwa de l’Ayatollah Charb”. Charb, tout comme le directeur de la rédaction, Riss, et le dessinateur Luz, se savaient menacés de mort depuis l’incendie criminel qui avait visé leurs locaux. Mais ils ont continué leur travail.

Cabu était un pilier de Charlie Hebdo et du Canard enchaîné. Soixante ans de carrière et plus de 35 000 dessins ont fait de lui l’un des grands caricaturistes pamphlétaires français.  Cabu, né Jean Cabut, né en 1938 à Châlons-sur-Marne est devenu  dessinateur de presse, suite à son expérience en Algérie durant son service militaire. Il avait rejoint François Cavanna, qui lanca Hara-Kiri, en 1960, avec les  caricaturistes de l’époque, Reiser, Topor, Fred, Wolinski.Passé à Pilote, l’hebdo dirigé par René Goscinny, Cabu crée “le grand Duduche”, le cancre révolté, sympa, qui l’accompagnera tout au long de sa carrière. Son coup de maître : son “beauf”, apparu en 1973 dans Charlie Hebdo. Une caricature de Français gueulard, alcoolique, raciste, inspiré d’un patron de bistrot, dont il fait une vedette. Au point de le faire entrer dans le dictionnaire. Dans les années 1980, il apparaît dans l’émission télévisée “Récré A2” : il y crée des planches en direct. Il fait partie de l’équipe d’animateurs aux côtés de Dorothée.Ses caricatures de Mahomet publiées en 2006 étaient parmi les plus caustiques de celles qui avaient valu à l’équipe de Charlie des menaces de mort. 

Wolinski , Georges Wolinski, 80 ans,  s’est fait un nom en exerçant sa plume dans Action pendant Mai 68. Il avait rejoint la rédaction de Hara Kiri, créé par François Cavanna et le professeur Choron.  Puis, de 1970 à 1981, il avait été le rédacteur en chef de Charlie Hebdo.

Tignous , Bernard Verlhac, 57 ans, dessinait sous le nom de Tignous pour l’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, mais aussi Marianne et Fluide glacial.

Bernard Maris, économiste, universitaire réputé, de 68 ans,  signait ses articles “Oncle Bernard”. Jusqu’en 2008, il en avait été le directeur adjoint de la rédaction. Bernard Maris écrivait aussi pour Marianne, Le Nouvel Observateur, Le Figaro Magazine ou Le Monde. Il tenait aussi des chroniques à la radio sur France Inter et à la télévision sur i-Télé.

En dehors de ces dessinateurs, des policiers, et de tous ceux qui ont payé de leur vie leur accompagnement à Charlie Hebdo, nous nous associons bien évidemment à la douleur de toutes les familles et de leurs amis. Nous les assurons de nos prières. Puissent-ils au ciel amuser Dieu et tous ses occupants… « Le rire est le propre de l’homme » écrivait Rabelais, au début du 16ème siècle. Ne le perdons pas en stériles réflexions.

Solange Strimon

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