Politique

Le rôle du noble au XXIe siècle, par Paul-Raymond du Lac

Pour beaucoup de nos contemporains, la noblesse évoque des sentiments contradictoires : l’admiration devant une grande histoire et un dégoût inculqué par la République via l’École, en raison des privilèges notamment.

Toute personne un peu cultivé sait bien que les privilèges (privus lex) ne sont rien d’autre que des « lois privées », soit des lois issues de l’histoire pour préserver des libertés particulières, en lien avec les missions et les fonctions de telle ou telle personne, de tel ou tel groupe. En ce sens, toutes les composantes de la société profitaient dans une certaine mesure de privilèges, qui n’étaient absolument pas l’apanage des nobles, comme d’aucuns le croient encore. L’abolition des privilèges fut en cela une catastrophe, car elle a signifié la fin des libertés particulières, qu’elles soient communales, corporatives, familiales, ecclésiastiques ou de noblesse. La porte était ouverte pour l’État d’envahir tout le champ occupé jusqu’alors par les acteurs locaux et légitimes : plus aucun privilège pour arrêter le Léviathan et empêcher la main d’un État, qui n’a plus d’incarnation autre que les tyrans démocratiques de passage, d’avoir une mainmise sur tous les détails de la vie de ses « citoyens-objets ».

Jadis, les sujets du Roi avaient des privilèges ; il n’existe plus aujourd’hui que des citoyens-objets, instruments du pouvoir…

La noblesse d’ailleurs était variée et plurielle : chaque famille était unique, avec son histoire, son enracinement et ses devoirs propres. Il existait toutefois des éléments communs tels que la fidélité au Roi et le service à Dieu, dans l’esprit chevaleresque et chrétien du sacrifice de soi pour protéger les plus faibles, symbolisés par la veuve et l’orphelin.

En France d’ailleurs, au XVIIIe siècle, tout le monde, en un certain sens, était noble : puisque la terre de France rendait « libre » (qui est sous bien des aspects le caractère historique de la noblesse :  les francs, tous nobles et guerriers, étaient libres ; les citoyens athéniens ou romains étaient libres, et par-là de facto, constituaient une aristocratie, etc.). Les serfs, en voie de disparition avant la Révolution, n’étaient pas des esclaves puisqu’ils ne dépendaient pas d’une personne, mais d’une terre (et la  terre, par définition, ne peut pas avoir de volonté tyrannique puisque c’est inerte, à la différence d’un mauvais maître). Ces serfs, de plus, le restaient volontairement, car c’était plutôt confortable : usufruit de sa terre assurée, aucun devoir de ban ou d’arrière-ban (devoir de l’homme libre : même le paysan qui n’était pas chevalier mais libre devait, en théorie, fournir un jour, deux jours ou trois jours par an pour la protection militaire ; en pratique, ces services se faisaient dans les milices locales pour la protection des communautés locales ; les nobles et chevaliers, eux, devaient à l’époque féodale des durées bien plus longues, ce qui les rendait disponibles pour entreprendre des campagnes).

Cela dit, la noblesse payant l’impôt du sang a toujours eu un rôle différent des autres libres, et qui se retrouvent dans toute société politique naturelle : la direction et le combat.

Selon le triptyque classique, qui permet de bien saisir comment fonctionne une société, une partie des gens ont la fonction sacrée, les prêtres (dans la société chrétienne les clercs et l’Église, le premier ordre), une partie est là pour diriger et se battre (le roi et la noblesse, second ordre), et les autres pour travailler à toutes les tâches nécessaires à la société politique (le tiers ordre), ces derniers profitant des fruits des rites du premier ordre, et de la direction et de la protection du second ordre, pour vivre paisiblement et faire son ciel à moindre frais.

Le noble a ainsi ce rôle particulier de direction (et donc de prévision) et de combat, pour défendre la justice, la faire appliquer, punir les méchants et soutenir les faibles, et aussi protéger tous ceux qui dépendent de lui, au prix de sa vie s’il le faut. Il est ordonné au bien commun, lui-même ordonné au salut des âmes, d’où sa place seconde dans la société après le premier ordre, qu’il défend, qu’il soutient et auquel il se soumet en matière spirituelle. Il est premier néanmoins dans l’ordre temporel en tant que celui qui agit prudemment et décide comme il faut pour le bien de tous.

A-t-on donc besoin de nobles au XXI siècle ? Plus que jamais ! puisqu’il suffit d’ouvrir les yeux pour voir que ce qui manque cruellement (et cela est volontaire) à la société démocratique individualiste est justement de vrais chefs qui agissent prudemment, servent le bien commun et surtout se sacrifient pour leurs citoyens… Nos « élites » sont aujourd’hui tout sauf nobles, elles en sont même l’exact contraire : court-termisme et absence de sens de la décision, imprudence constante, et, pire que tout, service de leurs propres intérêts !

Les « élites » contemporaines sont au sens le plus classique du terme des tyrans, mais des tyrans vraiment médiocres qui n’ont ni le courage, ni les capacités de se battre…

Alors le noble au XXIe siècle a toujours le même rôle qu’autrefois, et la société politique en a besoin. Nous en avons besoin parmi nous, les légitimistes aussi, car nous avons besoin de chefs et de chevaliers pour nous diriger et nous battre !

Le noble aujourd’hui ne porte peut-être plus que rarement l’armure pour aller se battre sur le champ de bataille — encore que ces temps de combats concrets vont certainement revenir plus vite qu’on ne le croit — mais  il se bat toujours, avec les outils de son époque mais avec le  même esprit de sacrifice, d’abnégation et de courage. Il s’agit d’agir pour l’honneur avant tout, un honneur bien compris qui est l’honneur de Dieu et du Roi Son lieutenant sur terre, qui, quel que soit sa qualité personnelle, est tributaire de la majesté divine.

Alors le noble a toute sa place en notre XXIe siècle :  il faut des chefs et des ferrailleurs, qui combattent, et beaucoup d’honnêtes hommes du tiers ordre, qui reçoivent avec joie ces chefs, se soumettent et obéissent pour permettre de travailler en harmonie, comme les musiciens dans un orchestre se soumettent au chef d’orchestre pour éviter la cacophonie et, espérons-le, produire une belle et harmonieuse musique ! La musique des Francs n’est pas compliqué :  servir Dieu et le Roi, et faire la geste de Dieu sur terre, sans peur ni reproches !

Le peuple franc est dans son ensemble un peuple noble : regardez combien nous sommes battants et combattifs malgré toutes les vexations révolutionnaires ! De nombreux étrangers admirent ce caractère guerrier de notre peuple, ainsi que l’esprit « noblesse oblige », qu’il est urgent de remettre au goût du jour.

Cela signifie évidemment de restaurer l’autorité, et de trouver notre place, dévolue par la Providence.

Alors travaillons à la restauration !

Paul-Raymond du Lac

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France !

2 réflexions sur “Le rôle du noble au XXIe siècle, par Paul-Raymond du Lac

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.