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L’hiver arabe des chrétiens syriens

Parmi les populations impliquées dans le conflit qui ravage la Syrie depuis plus d’un an, les chrétiens sont sans doute les plus oubliés. Leur situation est aggravée par le tour de plus en plus confessionnel et fanatique que prend le conflit. La présence de nombreux islamistes syriens ou étrangers parmi les rebelles de l’ASL, soutenus par les Occidentaux, les pays du Golfe et la Turquie, se fait de plus en plus insistante. D’après un étudiant réfugié au Liban voisin, des « miliciens arborant les drapeaux noirs du groupe [salafiste] Jubhat-el-Nosra » procèdent à des massacres à Hassakè, dans le nord-est du pays.

De nombreuses exactions de ce type peuvent être relatées. À Ras-al-Ain, près de la frontière turque, les rebelles soutenus par l’armée turque ont envahi la ville. Un jeune chrétien, pourtant proche de l’opposition à Bachar al-Assad, témoigne de la violence des événements : « au cœur de la nuit », les habitants sont expulsés de leurs maisons par les militaires, sans rien pouvoir emporter. Les rebelles avaient une liste noire de civils, sur laquelle figuraient les noms des chefs des familles chrétiennes. Les chrétiens de la cité n’ont dû leur salut qu’à l’intervention d’un musulman sunnite. Une fois partis, leurs maisons ont été saccagées.

Une autre situation dramatique concerne le patrimoine de la Syrie. Après la destruction du souk d’Alep, l’un des plus vieux au monde, les pauvres des faubourgs d’Hassakè sont réduits à couper les arbres centenaires du Parc national pour pouvoir se chauffer, explique l’archevêque syro-orthodoxe Eusthasius Matta Roham.

Cependant, le véritable enfer des chrétiens syriens se trouve à Hassakè. Dans un appel lancé à la FAO (organisation de l’ONU en charge de l’alimentation et de l’agriculture), Son Excellence Monseigneur Jacques Behnan Hindo, archevêque syro-catholique d’Hassakè-Nisibe, alerte sur la situation intenable où se trouve la métropole de 1,5 millions d’habitants (sans compter les plus de 400 000 réfugiés). La situation sanitaire a atteint un niveau critique : il est impossible d’acheminer de la nourriture, des bandes islamistes et des brigands déserteurs bloquent les routes menant à la ville. Le manque de blé devient insupportable, suite aux vols des céréales et à leur revente à des commerçants turcs, « à la vue et au su des douaniers turcs », témoigne Mgr Benhan. L’insécurité est totale : « des groupes armés vont et viennent dans la rue. Les enlèvements se succèdent […]. Les jeunes chrétiens sont menacés », relate le père Ibrahim, résident à Hassakè. Les crimes de guerre se multiplient, les jeunes sont particulièrement visés : les islamistes « les cherchent […] et les tuent de sang-froid », raconte Georgius, étudiant syrien réfugié au Liban.

Ces groupes terroristes sont financés en grande partie par le Qatar, ce qui montre que l’on ne peut faire confiance aux pétromonarchies. Ce qui est plus grave, c’est l’aide, directe ou indirecte, qu’ils reçoivent des États-Unis et des pays européens. Si ces États agissaient par naïveté, il serait temps qu’ils se renseignent un peu plus et qu’ils agissent avec discernement. S’ils agissaient par intérêt géopolitique et économique, ils se rendent sciemment complices de crimes de guerre et peut-être de génocide.

François Etendard

 

L’ensemble des témoignages rapportés dans cet article ont été recueillis par l’agence Fides, dépendante du Saint-Siège, et peuvent être consultés ici : http://www.fides.org/aree/news.php? lan=fra&_qf__searchForm=&dal[d]=01&dal[M]=01&dal[Y]=2003&testo=hassak%C3%A8&btnSubmit=Search

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