Chretienté/christianophobie

Vive le curé inamovible !

Le saint curé d’Ars n’aurait pas existé sans l’inamovibilité de sa charge. Et combien de saints curés n’auraient pas existé sans cette douce coutume de l’Église universelle, abolie après le concile Vatican II ?

On ne laboure pas les âmes comme un champ, et il faut du temps, beaucoup de temps, idéalement des décennies : la paroisse est une grande famille, avec ses familles, ses clans, ses blessures cachées, ses caractères, ses périodes de fastes et de moins fastes, d’heurs et de malheurs. Si le curé, comme le seigneur d’ailleurs, ne sont pas stables, alors où trouver son ancre ? Comment aider à croire à la stabilité du Dieu unique, de NSJC, si ses représentants sur terre ne sont pas stables et peuvent être à la merci de la moindre décision arbitraire ?

Dieu montre pourtant bien dans l’histoire qu’une fois qu’il a « nommé » un roi, un seigneur, ou autre, il ne retire pas sa décision facilement, même quand c’est un tyran, un méchant ou autre. Tout autorité vient du ciel, selon le mot de saint Paul.

Les papes ne peuvent pas être destitués en principe avant leur mort, ni ne devraient pouvoir « démissionner » (quelle insulte au bon Dieu ! quelle fuite !). Les évêques, autrefois, comme princes de l’Église, ne pouvaient valser comme il est de coutume aujourd’hui, quand ils vont de poste en poste, comme dans une entreprise, pour monter dans l’administration.

Autrefois le Pape pouvait demander à un évêque de devenir nonce, ou autre, mais jamais le forcer à démissionner de sa charge…

Idem, l’évêque, une fois un curé inamovible nommé, ne pouvait jamais le démettre de ses fonctions.

Que ce soit l’évêque, le pape ou le curé inamovible, seul un crime grave pouvait permettre un renvoi – et pour le pape, comme il n’a pas d’autorité supérieure sur cette terre, en pratique personne ne peut le démettre.

Ce doux système de l’inamovibilité permet non seulement de bien labourer les âmes et de vraiment devenir pasteur de son troupeau (car le pasteur qui change son troupeau tous les deux ou trois ans, même tous les dix ans, est plus proche du mercenaire que du pasteur !), mais aussi de résister sainement, juste en étant là et en faisant, aux injustices des supérieures, qui ne peuvent pas faire ce qu’ils veulent du fait même de l’existence de cette coutume : mieux, cette coutume aide les supérieurs à gouverner plus justement, puisqu’ils ne peuvent jamais démettre quelqu’un sur un sentiment ou une incompatibilité de caractère. Vous me direz que cela manque d’efficacité et que le mauvais curé est une charge pour tous.

Non, ce raisonnement est aussi faux que de dire que la monarchie est mauvaise car on ne choisit pas le roi et qu’il pourrait être mauvais.

Au contraire l’inamovibilité apporte les bienfaits de l’hérédité de la politique dans la vie spirituelle.

Quand le curé inamovible est bon, combien de bien fait-il, et de façon combien supérieure à n’importe quel clerc de passage ! Le meilleur des prêtres ne peut pas durablement faire fructifier ses âmes, car dans cette matière cela prend du temps, mais aussi une fine et profonde connaissance de son troupeau. Il ne s’agit pas ici d’œuvres extérieures, faciles, comme construire une église, faire quelque chose de matériel ou quoi, mais de convertir les cœurs, de permettre la méditation, la bonne confession, etc. Toutes choses profondes qui demandent une grande confiance et intimité, que seul le temps peut permettre.

Le « mauvais » curé au contraire sera adouci par son inamovibilité : comme pour un roi qui reste toute sa vie roi, le curé toute sa vie curé de la même paroisse ne peut pas en pratique se permettre d’être mauvais, car sinon il sera viré d’une façon ou d’une autre non pas par sa hiérarchie, mais par sa base.

Disons-le encore : ce sujet qui est ignoré universellement aujourd’hui dans l’Église est pourtant central. Il est déplorable qu’il soit aussi, voire surtout, ignoré dans les communautés traditionnelles, et toutes les communautés traditionnelles, qui ont tendance – sous le prétexte de la mission – à appliquer une gestion d’entreprise, avec valse des postes trop fréquentes, et habitudes de prendre des décisions verticales fortes, comme en entreprise, contre la coutume de l’Église.

Dans certaines terres de missions, certes on pourrait comprendre, quoique même là la stabilité devrait être la priorité (tant dans les clercs présents que les prieurés), mais le problème c’est que même dans les terres plus stables, ou de facto, certains prêtres restent longtemps au même endroit, cette situation n’est pas protégée par le droit de l’inamovibilité, et tous ces prêtres sont toujours passables de « mutations » du jour au lendemain sans pouvoir de résistance (à part la rébellion, qui par définition est mauvaise et peccamineuse)…

Alors nous appelons d’abord les sociétés traditionnelles de l’Église de changer leur façon de diriger leurs prêtres et de revenir aussi là à l’esprit de l’Église universelle. La Tradition n’est pas que le dogme, la liturgie, les dévotions, mais aussi les pratiques politiques au sein de l’Église !

Cela est d’autant plus crucial que la politique traditionnelle a disparu aujourd’hui, et que l’influence du monde en cette matière, dangereuse, est malheureusement entrée aussi dans les forteresses de la Tradition portées par les communautés traditionnelles, les menaçant de l’intérieur…

Que Dieu nous entende, et que ceux qui incarnent son autorité, chacun dans sa mesure et sa place, nous entendent !

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France

Antoine Michel

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