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Sermon sur la brièveté de la vie

Dans l’Évangile d’aujourd’hui est répétée plusieurs fois la même phrase, au point d’en être presque ennuyant : « Encore un peu de temps et vous ne me verrez plus ; et encore un peu de temps et vous me verrez. » (Jn 16;16). Notre-Seigneur dit cela à ses Apôtres pendant la Dernière Cène afin de les avertir de ce qui allait arriver : après quelques heures ils ne Le verraient plus car Il serait mort et mis au tombeau, puis après 3 jours ils Le verraient de nouveau car Il serait ressuscité.

Mais cette même phrase est une promesse que Notre-Seigneur fit non seulement à ses Apôtres mais aussi à nous tous. Ce «peu de temps» pendant lequel nous ne voyons pas Jésus, c’est le temps de notre vie sur terre. Le temps pendant lequel nous verrons Jésus, c’est la vie Divine ainsi que Jésus Lui-même le dit : « La vie éternelle, c’est qu’ils Vous connaissent, Vous le seul vrai Dieu, et Celui que Vous avez envoyé, Jésus-Christ ». (Jn 17;3). Notre-Seigneur nous promet la vie éternelle si sur terre nous vivons selon son enseignement.

L’Évangile est un livre historique court dans lequel l’évangéliste dit sobrement les choses essentielles, sans perdre son temps. Et pourtant, trois fois, en quelques lignes, il répète la même phrase : « Encore un peu de temps et vous ne me verrez plus ; et encore un peu de temps et vous me verrez. » Pourquoi ? Pour graver profondément dans nos mémoires le souvenir de la brièveté de notre vie sur terre, et dans nos cœurs l’Espérance de la vie éternelle.

Le souvenir de la brièveté de notre vie sur terre doit nous inciter à trois choses : la patience dans les épreuves, le détachement des choses de ce monde et le zèle à faire le bien.

Patience dans les épreuves

Tout le monde sur terre a son lot de souffrance, physique ou morale. À la question : « Pourquoi Dieu qui est si bon nous laisse t-Il souffrir sur terre ? » Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus répond : « Il en coûte au Bon Dieu de nous abreuver de tristesses, mais Il sait que c’est l’unique moyen de nous préparer à le connaître comme Il se connaît et à devenir des dieux nous-mêmes. » Et c’est pourquoi St Thérèse disait : « La sainteté ne consiste pas à dire des belles choses, elle ne consiste même pas à les penser, à les sentir ! Elle consiste à souffrir et à souffrir de tout. »

Notre-Seigneur Jésus nous encourage à la patience en nous disant que ces souffrances sont pour « un peu de temps» seulement. Saint Augustin dit que «ce peu de temps nous paraît bien long, parce qu’il dure encore; mais lorsqu’il sera écoulé, nous comprendrons alors combien courte a été sa durée». Et Notre-Seigneur nous promet que le bonheur éternel sera le résultat du travail mystérieux qu’opère la souffrance dans nos âmes.

Quand nous sommes dans la souffrance, et que nous considérons l’avenir, il peut nous venir une inquiétude: « comment allons-nous pouvoir supporter cette souffrance pendant peut-être encore des années ? » Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus répond en nous rappelant d’avoir foi en l’amour de Dieu pour nous. Elle disait : «Je trouve que nous ne devons pas penser à ce qui peut nous arriver de douloureux dans l’avenir, car alors c’est manquer de confiance et c’est comme se mêler de créer». En effet, quand le Bon Dieu nous fait passer par une souffrance, en même temps Il créé une grâce spéciale qu’Il nous donne à ce moment-là, et seulement à ce moment-là, pour nous permettre de souffrir patiemment. Dans son poème Mon Chant d’Aujourd’hui, Sainte Thérèse exprime la même idée dans la strophe suivante (4) : « Si je songe à demain, je crains mon inconstance / Je sens naître en mon cœur la tristesse et l’ennui./ Mais je veux bien, mon Dieu, l’épreuve, la souffrance / rien que pour aujourd’hui. »

Détachement dans la prospérité

Se souvenir de la brièveté de la vie sur terre non seulement nous encourage à la patience dans les épreuves mais aussi nous protège des dangers de la prospérité. En effet la prospérité des affaires temporelles, c’est-à-dire le succès dans nos entreprises, la richesse, la reconnaissance sociale et les honneurs…, comporte bien des dangers, comme de tomber dans le mépris de Dieu, la négligence de la vie spirituelle, l’orgueil, l’avarice et l’injustice, la luxure, etc. C’est à cause de ces nombreux dangers que Notre-Seigneur Jésus a dit : « En vérité, Je vous le dis, un riche entrera difficilement dans le royaume des Cieux. » (Mt 19;23). Saint Paul disait à Saint Timothée : « Ordonne aux riches de ce siècle de ne pas être orgueilleux, et de ne pas mettre leur espérance dans les richesses incertaines, mais dans le Dieu vivant, qui nous fournit abondamment toutes choses pour en jouir ; de faire du bien, de devenir riches en bonnes œuvres, de donner de bon cœur, de faire part de leurs biens, de se faire un trésor placé sur un fondement solide pour l’avenir, afin de saisir la véritable vie. » (1 Tim 6 ; 17-19).

Se souvenir de la brièveté de la vie aide puissamment à de détacher des biens de ce monde. Voici un bel exemple dans la vie de Saint Thomas More, le chancelier d’Angleterre au temps du roi Henri VIII. Il fut condamné à mort par le roi à cause de sa Foi Catholique et sa défense des lois du mariage. Sa femme vient le trouver dans son cachot, le suppliant d’avoir pitié d’elle et de leurs enfants. Saint Thomas lui demanda : « Combien de temps pourrons-nous jouir encore des biens et des honneurs que me promet le roi ? » Sa femme répondit : « Mon cher époux, encore au moins vingt ans ! » Et Saint Thomas répondit : « Hé quoi, insensée, voudrais-tu que, pour vingt ans d’une très précaire félicité terrestre, je perde l’éternelle félicité qui m’attend au Ciel ?… que pour vingt ans de joies trompeuses, je me condamne à une éternité de souffrance et de tourments ?…». Belle et très juste réponse ! La vraie vie n’est pas cette vie sur terre, mais la vie après la mort. C’est elle dont il faut s’occuper en priorité.

Zèle pour faire le bien

C’est pourquoi, la parole de Notre-Seigneur Jésus : « Encore un peu de temps et vous ne me verrez plus ; et encore un peu de temps et vous me verrez. » nous incite aussi au zèle à faire des œuvres de charité sans perdre notre temps. Nous n’avons que cette vie pour donner à Notre-Seigneur. Donner quoi ? Donner nos témoignages d’amour sincère. Cela se fait à travers notre fidélité à ses commandements, notre joie spirituelle à le servir, notre acceptation confiante de toutes les souffrances de la vie, notre générosité à accomplir les œuvres de miséricorde envers notre prochain.

Passer notre vie sur terre à faire plaisir à Jésus en saisissant toutes les occasions de Lui témoigner notre amour, c’est la source de la vraie joie. Car, comme Notre-Seigneur l’a dit par la bouche de Saint Paul, « Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » (Act 20;35).

Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus écrivait ceci : «Nous n’avons que les courts instants de notre vie pour aimer Jésus. Le diable le sait bien, aussi tâche t-il de la consumer en travaux inutiles.» Aussi n’est-il pas surprenant qu’à notre époque luciférienne, nous assistons par exemple à une prolifération invraisemblable de films, jeux vidéos, réseaux sociaux, qui sans même parler de toute la corruption intellectuelle et morale qu’ils véhiculent, font vivre les gens dans un monde qui n’existe pas, et leur font perdre une quantité colossale de temps. Vous qui passez une heure, deux heures, trois heures ou plus à regarder des films, faire des jeux vidéo, discutailler sur les réseaux sociaux, posez-vous la question après cela : « qu’est ce qui me reste du temps que je viens de passer ? Qu’est ce que cela m’a-t-il apporté ? Quelle valeur cela a-t-il pour la vie éternelle ? De ce temps passé, quel compte-rendu vais-je donner à mon Juge au moment de ma mort ?… » À travers ces technologies, le démon nous fait consumer notre vie en choses inutiles. Et s’il ne parvient pas à nous faire tomber en enfer, au moins il réussit à diminuer beaucoup notre gloire au Ciel.

Nous n’avons qu’une seule vie sur terre, et elle est courte, même si on vit 100 ans. Chaque minute qui passe ne reviendra jamais, et chaque minute a un poids d’éternité. Cela veut dire que chaque minute, selon qu’elle est utilisé pour aimer Dieu ou pas, a des conséquences sur notre vie éternelle.

Conclusion

Chers amis, « encore un peu de temps et vous me verrez ». Ce « un peu de temps », c’est maintenant. Puis le jour de notre mort, nous verrons Jésus. Mais il y a deux façons possible de le voir à ce moment-là : ou bien comme notre juste juge nous disant : « Allez maudits au feu éternel », ou bien comme notre ami nous disant : « Venez les bénis de mon Père, possédez le Royaume ». (Mt 25 ; 34)

Si nous voulons entendre cette deuxième phrase, pendant notre vie sur terre, donnons à Jésus des témoignages de notre amour autant que nous pouvons, dans toutes les circonstances de notre vie, même les plus insignifiantes, et sans perdre de temps. Et alors, comme aimait le dire Saint Thérèse de l’Enfant-Jésus, un jour Jésus nous dira : « Maintenant à mon tour de vous donner ». Et ce sera la vie éternelle.

Un prêtre missionnaire

Illustration : Claudius Jacquand, Saint Thomas More recevant sa femme et sa file en prison (détail), 1828, musée des Beaux-Arts de Lyon.

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