Chretienté/christianophobie

Clôture du Synode par la béatification de Paul VI

Pour ce dimanche 19 octobre, nous avons la chance de bénéficier de deux évènements pour lesquels vous trouverez inévitablement quelque intérêt pour l’un ou pour l’autre, si ce n’est les deux (ô joie de l’espérance !). Notre cher pape François ne manque nullement d’imagination pour réveiller nos cœurs de catholiques parfois endormis, ou tièdes ou désabusés. Réveillons-nous, c’est l’heure ! François dispose aussi de l’incroyable productivité des médias, tant traditionnels que sociaux et de sa propre presse. Il ne laisse aucun média indifférent à ses actions. Et pour lui, le synode a été : « “franc, ouvert, charitable envers les autres”. Constat donné également par les participants ! Le pape François  a toujours été présent, mais s’est contenté de dire « buona sera » le soir, « buon pranzo » (bon déjeuner) le midi et une fois, « buona siesta » ce qui a déclenché une très grande joie. Nombreux ont été ceux qui sont venus lui offrir des cadeaux, le faire signer, et tant d’autres petites choses qui rappellent combien nous sommes sensibles à sa simplicité et sa bonne humeur.

Rappelons que sur les 191 pères synodaux présents du 5 au 19 octobre, 42 venaient d’Afrique, les autres se répartissant de la manière suivante : 38 d’Amérique, 29 d’Asie, 78 d’Europe et 4 d’Océanie. Pour donner l’esprit de ce synode, nous avons choisi de citer trois archevêques. Mgr Bruno Forte, archevêque de Chieti-Vasto (Italie), secrétaire spécial du synode, a assuré que « chacun avait  parlé avec une totale liberté en s’efforçant d’écouter les autres », un exercice de la “synodalité”, qui consiste à “avoir la patience de marcher ensemble pour évoluer ensemble”, en assemblée de tant de pays et cultures différents. Question de  “synodalité spatiale” en même temps que temporaire : il faut du temps pour marcher ensemble. Pour le cardinal philippin Luis Antonio Tagle, archevêque de Manille, l’un des présidents délégués, il a fait observer qu’il n’est “pas facile” de “mettre ensemble” les éléments du rapport. Et pour le cardinal Ricardo Ezzati Andrello, archevêque de Santiago du Chili et président de la Conférence épiscopale chilienne, c’est un “synode qui écoute, qui s’émeut, qui cherche des chemins pour trouver ce que l’Église sent, en tant que disciple de Jésus, pour servir l’humanité”.

Aussi loin que nous soyons physiquement des discussions, n’ayant pas réussi à devenir invisible pour y assister, et ne disposant pas de capacités intellectuelles supérieures à plus de celles du commun des mortels,  nous suivrons avec nos moyens les comptes-rendus quand ils sortiront et vous en ferons part (si vous le souhaitez).

Si tout semble bien se dérouler dans les débats concernant l’Europe et l’Amérique du nord, en tenant compte toutefois des divergences existant entre les évêques à propos notamment de l’accès aux sacrements des divorcés remariés, les participants ont-ils pris conscience qu’ailleurs, en Afrique par exemple, c’est une toute autre histoire ? Le professeur congolais Bénézet Bujo, spécialiste des théologies africaines et professeur au département de théologie morale et d’éthique à l’université de Fribourg en Suisse, rappelle : « On ne peut ignorer les autres cultures, qui devraient aussi avoir leur place dans le christianisme ». Il demande la reconnaissance de la sacramentalité du système matrimonial africain par une refonte de ce qui se pratique actuellement, le « mariage par étapes ». En effet, il existe en Afrique trois étapes : le mariage coutumier, qui implique les familles, le mariage civil, au niveau de la municipalité, et le mariage religieux, à l’église : « Les Occidentaux ont vu le mariage à partir de leur culture et ils l’ont présenté dans l’Église catholique romaine comme ayant une valeur universelle. »

Bénézet Bujo explique qu’en Afrique, le mariage n’est pas uniquement l’affaire du couple mais aussi celle de la communauté. La notion d’alliance entre personnes est indissociable de celle de l’alliance entre familles. « Dans la tradition africaine, ce ne sont pas les deux époux qui décident seuls. La communauté et les anciens connaissent l’arrière-fond culturel et les antécédents des familles ».  Alors que dans la théologie catholique, ce sont les époux qui se donnent le sacrement de mariage. Il est un autre sujet en Afrique qui demande plus que de la réflexion, du bon sens et la connaissance de la culture. Il s’agit de la polygamie. Le débat est si lourd de conséquences que nous ne nous y attarderons pas, espérant toutefois que l’Afrique sera étudiée avec toutes ses différences par rapport au monde occidental.

Mais à peine ce IIIème synode « extraordinaire » se termine-t-il, que le pape fait annoncer le prochain thème du prochain synode “ordinaire” sur la famille  du 4 au 25 octobre 2015 : “La vocation et la mission de la famille dans l’Église et dans le monde contemporain » avec des représentants élus des différentes conférences épiscopales. Avant d’arriver à cette étape, les évêques vont poursuivre leurs réflexions sur les défis de la famille aujourd’hui. Un sacré casse-tête soit dit en passant !

Venons-en à Paul VI, le mal-aimé Jean-Baptiste Montini est né le  26 septembre 1897 à Concesio (Piémont) dans une famille aisée. Il fut baptisé le 30 septembre, jour de la mort de Sainte Thérèse. Il bénéficia dans sa jeunesse d’une belle culture chrétienne et surtout d’une ouverture à l’autre, à la différence. Il étudie chez les Jésuites et se lie d’amitié avec Maritain et Guitton. Il est d’une santé fragile ce qui ne l’empêche pas d’être ordonné prêtre à l’âge de 23 ans, d’étudier, de s’engager dans de nombreux combats et d’obtenir un doctorat en droit canon le 9 décembre 1923. Il connaîtra un beau parcours qui l’amènera à occuper le trône de Saint Pierre et à devenir ce qu’il devient ce 19 octobre 2014, le Bienheureux Paul VI.

Quelques dates importantes à propos de Paul VI : 29 mai 1920, ­ordination sacerdotale ; 24 octobre 1924, ­secrétaire d’État au Vatican ; 11 octobre 1962, ouverture de Vatican II par Jean XXIII ; 21 juin 1963, le cardinal Montini est élu pape.

Les raisons du désamour d’une partie des catholiques (et des autres) pour Paul VI viennent sans doute de l’encyclique Humanae Vitae, qui traitait  « sur le mariage et la régulation des naissances ». Et pourtant, ce texte du 25 juillet 1968 reste aujourd’hui le texte fondateur de l’Église en matière de doctrine de la famille, en particulier concernant la procréation. Le pape Paul VI disqualifiait définitivement toute méthode de contraception artificielle, les estimant « intrinsèquement déshonnête ». Jean-Paul II, puis Benoît XVI ont réaffirmé la position de l’Église exposée à ce sujet dans l’encyclique. Que de temps faut-il pour réaffirmer le respect de la vie, de l’amour et de la sexualité et donner aux prêtres une vraie formation de conseillers conjugaux et familiaux leur permettant d’accompagner les couples, non seulement pour la préparation à leur mariage (où tout est nouveau, tout beau), mais plus tard pour affronter divers problèmes, confiés à des psychiatres !

Pour qui n’a pas vécu mai 68 à Paris, sans doute faut-il y revenir pour rappeler que mai 68 a laissé le souvenir d’une atmosphère ludique et hédoniste et des slogans dérangeants, comme « Jouissez sans entraves » ou encore « Il est interdit d’interdire ». Pour les étudiants en particulier, il s’agissait enfin de la libération de la parole et de la sexualité avec la pilule contraceptive qui venait tout juste d’être légalisée en 1967. Laissons de côté la politisation du mouvement, c’est un autre sujet. Fallait-il voir dans cette légalisation de la contraception et l’abandon des avortements pratiqués en Suisse pour les nantis, sur place pour les autres, avec les risques de mortalité et de stérilité, le besoin d’une intervention de la plus haute autorité morale, à savoir l’Eglise ? Cela nous semble évident. N’oublions pas qu’en 1968, les représentants de l’Église n’étaient pas perçus aussi « aimablement » qu’aujourd’hui. Mais parler du présent sans évoquer le passé n’a pas de sens.

Le 262ème pape de l’Église catholique romaine ne fut pas très apprécié de son vivant et ne bénéficia que de… l’oubli. Le cher cardinal Roger Etchegaray (avec lequel nous avons pu échanger quand il était à Marseille) a dressé récemment un magnifique portrait du pape Jean-Baptiste Montini. Celui-ci devrait lui permettre de gagner quelques cœurs. Il résume bien le personnage : « il était comme rongé par la hantise de porter la Bonne Nouvelle du Sauveur aux peuplades les plus minoritaires et aux cultures les plus éloignées. Il a été le premier pape à prendre l’avion pour des voyages internationaux (9 à son compte). Pape moderne en ce sens qu’il a osé regarder le monde en lui-même, non plus seulement à partir de l’Église mais comme le monde se voit lui-même, avec ses audaces, ses risques et ses chances. »

Paul VI mena à son terme Vatican II (1962-1965), inauguré par son prédécesseur Jean XXIII. « Les vertus héroïques » de Paul VI avaient été reconnues par Benoît XVI en 2012. Le pape François en a tenu compte et il ne manquait qu’un miracle, reconnu avec la guérison inexpliquée d’un fœtus, attribuée à l’intercession du pape Paul VI. Celle-ci a été accordée par la Congrégation pour la cause des saints comme un miracle permettant sa béatification. Âgé de 80 ans et souffrant d’arthrose, Paul VI a vécu ses derniers jours presque toujours allongé. Victime d’une crise cardiaque en fin d’après-midi le 6 août 1978 dans sa résidence d’été de Castel Gandolfo, il meurt quatre heures plus tard, à 21h00, le jour de la Transfiguration du Christ. Inhumé le 12 août 1978, il est enterré selon ses souhaits dans les grottes du Vatican après une cérémonie très sobre qui a lieu sur le parvis de la basilique Saint-Pierre.

Nous conclurons avec un extrait de son Homélie du 29 juin 1972, qui donne bien le ton de ses combats : « nous avons le sentiment que par quelque fissure la fumée de Satan est entrée dans le peuple de Dieu. Nous voyons le doute, l’incertitude, la problématique, l’inquiétude, l’insatisfaction, l’affrontement. On n’a plus confiance dans l’Église. On met sa confiance dans le premier prophète profane venu qui vient à nous parler de la tribune d’un journal ou d’un mouvement social, et on court après lui pour lui demander s’il possède la formule de la vraie vie, sans penser que nous en sommes déjà en possession, que nous en sommes les maîtres… Le doute est entré dans nos consciences, et il est entré par des fenêtres qui devraient êtres ouvertes à la lumière… Nous croyons à l’action de Satan qui s’exerce aujourd’hui dans le monde précisément pour troubler, pour étouffer les fruits du Concile œcuménique, et pour empêcher l’Église de chanter sa joie d’avoir repris pleinement conscience d’elle-même… ».

Puisse Paul VI, le courageux pape, vous être plus familier et vous donner envie de lire ses ouvrages. Et malgré tout ce qui se passe dans le monde, ne nous laissons pas envahir par le découragement. Il existe des solutions pour tous les problèmes. Donnons au Saint Esprit la volonté d’influencer les dirigeants du monde entier dans le bon sens de la vie. Prions, espérons, partageons quand nous le pouvons, donnons quand nous avons l’essentiel, restons des modèles de joie avec le Christ Sauveur et aimons-nous les uns les autres, surtout quand c’est difficile, sinon quel intérêt ? Excellente semaine à toutes et à tous et profitez de chaque instant de joie que la vie nous offre…

Solange Strimon

NB : L’avant-dernier Dimanche du mois d’octobre, l’Église nous invite plus spécialement à intensifier nos prières pour les importantes missions Les catholiques des 5 continents sont invités à donner une offrande pour aider les paroisses les plus pauvres de plus de 70 pays. Ce 19 octobre, le pape a insisté sur la responsabilité de chaque baptisé dans l’évangélisation. Oserons-nous vivre en « disciple missionnaire » et « sortir » ? Avec Jésus Christ,  la joie naît et renaît toujours. (Evangelii Gaudium, n.1)

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