Vie des royalistes

Lettre ouverte à Louis XVI


Chronique d’une mort annoncée du « Fils de Saint-Louis »

Votre Majesté,

Nous voici à quelques jours du 21 janvier 2014, soit 221 ans après votre exécution. Nous allons comme tous les ans vous témoigner notre attachement et notre fidélité en nous rendant à différentes messes organisées dans (presque) toutes les villes de France.  Soyez assuré votre Majesté que nous continuons de prier pour la paix de votre âme, de celui de votre famille et de tous ceux qui ont été assassinés durant cette période de barbarie qui a donné à la France son image de terreur et de folie. Nous n’oublierons jamais toutes les exactions qui ont été commises avec la guillotine, les armes blanches, les massues, les  canonnades, les fusillades, les noyades etc.  Il nous faut cependant veiller à ce que les documents relatant ces évènements ne disparaissent pas… pour qu’on fasse oublier la Grande Terreur.

Permettez-nous votre Majesté de rappeler à tous ceux qui sont encore intéressés par notre histoire comment la France, une terre civilisée, chrétienne, empreinte de sensibilité et de justice a pu arriver à vous traiter, vous, avec autant de cruauté, de mépris, d’absence totale de sentiments, d’une telle froideur calculée qu’il parait difficile de la comprendre.

Vous qui devez – du haut de votre résidence céleste entouré des vôtres –  suivre avec attention la vie de votre peuple, nous avons envie de vous dire combien nous restons sensibilisés à ce destin tragique qui fut le vôtre.

Vous souvenez-vous votre Majesté de cette chanson qui courait les rues en décembre 1792 : « Ô mon peuple, que t’ai-je donc fait ? J’aimais la vertu, la justice ; Votre bonheur fut mon unique objet, Et vous me traînez au supplice…Si ma mort peut faire votre bonheur, Prenez mes jours : je vous les donne. Votre bon roi, déplorant votre erreur, Meurt innocent, et vous pardonne. Ô mon peuple, recevez mes adieux ; Soyez heureux, je meurs sans peine. Puisse mon sang en coulant sous vos yeux, Dans vos cœurs éteindre la haine ». L’auteur de ce texte avait bien saisi les traits de votre personnalité.

Avez-vous souvenir votre Majesté de vos derniers jours, vous pour qui un cruel régime spécial avait été inventé, au point de devenir un harcèlement continuel       ? Dans votre prison, deux gardiens affectés à votre surveillance et changés tous les jours (sans doute pour éviter tout attachement) ne vous quittaient pas des yeux. Jamais, vous n’avez eu le moindre répit. Nous savons qu’à partir du 29 septembre 1792, vous viviez dans le donjon du Temple, sorte de triste forteresse militaire du XIIIe siècle, dans la pénombre, ce qui avait pour objectif de vous amener à la dépression et de ne plus vous permettre de lire. Il vous était aussi imposé de vivre dans l’humidité avec toutes les conséquences que l’on connaît. A cette même date, on ne vous a plus autorisé  qu’une petite heure à recevoir votre famille et uniquement au moment des repas. Le 11 décembre, votre famille vous a été enlevée. Vos geôliers n’ont autorisé d’autre visite que celle de vos défenseurs. Comme vous avez dû souffrir de cette terrible solitude dans ce lieu sordide ! Alors que vous aviez demandé en son temps de l’air et de la lumière pour les prisonniers de droit commun ! Vous ? On vous en a privé…

Les jours se suivent et ne se ressemblent pas dans la progression des actes barbares auxquels se sont livrés les révolutionnaires. Vous vous en souvenez certainement, même 221 ans après, disposant d’une mémoire sans faille. Le 18 janvier, il avait été décidé – sans doute en prévision du 21 janvier – de passer à l’inventaire de votre appartement, vous signifiant ainsi votre mort prochaine.

Le 20 janvier, vous découvrez avec les décrets de la Convention la date de votre mise à mort. O votre Majesté, il s’agit bien d’une mise à mort. Vos  geôliers vous autoriseront à voir votre famille pour la dernière fois, sans vous permettre toutefois la plus petite intimité. Quelle cruauté ! Vous avez soupé à onze heures. Puis vous avez vu seul votre confesseur jusqu’à deux heures du matin. Qu’avez-vous fait au cours de vos dernières heures ? A quoi avez-vous pensé ? Où avez-vous trouvé le réconfort pour affronter avec un certain détachement l’ultime épreuve de la mort publique ?

Le jour de l’exécution, le 21 janvier, à six heures du matin, vous avez pu entendre la messe. Ce droit ne vous avait pas été accordé depuis le 9 août 1792 et vous avez beaucoup souffert de cette privation. Les monstres ne vous avaient pas donné le droit de vous réconforter auprès de Notre Seigneur Jésus-Christ. Deux heures plus tard, le terrible Antoine Santerre, commandant de la garde Nationale (en remplacement de Mandat, assassiné par la foule lors des événements du 10 août 92),  est venu accompagné des prêtres jureurs Jacques Roux et Jacques-Claude Bernard. Nous étions en plein hiver et la neige obstruait les rues. De votre prison à la place de la Révolution, un petit trajet de deux heures, on dit que vous avez lu « Les prières des agonisants » avec calme. Pouvait-il en être autrement ?  De nombreux documents relatent votre comportement si digne, si exemplaire, si courageux. 

Il a été écrit à propos de vos derniers instants : « Il ôta son habit et son col lui-même, et resta couvert d’un simple gilet de molleton blanc. Il ne voulait pas qu’on lui coupât les cheveux, et surtout qu’on l’attachât. Quelques mots dits par son confesseur le décidèrent à l’instant.»

Devant l’échafaud, vous avez dit à votre peuple, qui n’a pu vous entendre étant donné le roulement assourdissant des tambours, commandé par Antoine Santerre : « Je meurs innocent de tous les crimes qu’on m’impute ; je pardonne aux auteurs de ma mort ; je prie Dieu que le sang que vous allez répandre ne retombe pas sur la France. »

Il est écrit sur le procès-verbal de l’exécution : « A dix heures vingt-deux il a monté sur l’échafaud. L’exécution a été à l’instant consommée, et sa tête a été montrée au peuple. Les citoyens ont trempé leurs piques et leurs mouchoirs dans le sang. » Il est prêté à l’abbé Edgeworth cette petite phrase : «  Allez, fils de Saint-Louis, le ciel vous attend ».

D’effroyables scènes de démence ont suivi. De proches témoins du lieu de votre supplice ont voulu s’imprégner de votre sang. La république commençait ainsi : par le sang, par votre inconcevable assassinat, qui a été suivi par bien d’autres, vous le savez.

Alors que votre dernier message montait au ciel, vous êtes resté dans l’indulgence : « Messieurs, je suis innocent de tout ce dont on m’inculpe. Je souhaite que mon sang puisse cimenter le bonheur des Français. »

Votre Majesté, nous vous assurons solennellement de toujours maintenir votre mémoire vivante dans le cœur des Français, vous qui aviez écrit le 5 mai 1789 : « Je connais l’autorité et la puissance d’un Roi juste au milieu d’un peuple fidèle et attaché de tout temps aux principes de la Monarchie : ils ont fait la gloire et l’éclat de la France ; je dois en être le soutien, et je le serai constamment».

Vous n’aviez pourtant d’autre ambition que le bonheur des Français. De mauvais conseillers, une communication inadaptée, une certaine faiblesse, un caractère trop confiant, trop bon, vous ont amené à cette guillotine, vous Louis XVI déclaré “martyr” par le Pape Pie VI, vous pour qui nous prierons avec ferveur ce 21 janvier 2014.

Solange Strimon

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