Idées

Vers une finance catholique ?

On l’entend partout en ce moment, quatre lettres et beaucoup d’interrogations : UDMF. À l’heure où une partie de la société française se pose des questions sur la comptabilité de l’Islam avec la France, ce parti musulman fait les gros titres. D’autant que dans son dernier ouvrage Soumission, Michel Houellebecq décrivait dans un futur proche la création d’un parti confessionnel de la même trempe, c’est à dire « modéré » et « républicano-compatbile » qui accédait aux plus hautes marches du pouvoir pour hallaliser en douceur la société française en décomposition.

L’Union des démocrates musulmans de France souhaite lui aussi prôner des valeurs islamiques et les imposer, au moins dans le débat public. Si je condamne ce parti pour plusieurs raisons, une de ses mesures a retenu mon attention car – croyez-le ou non – sur la question je suis en accord avec eux.

Ce n’est évidemment pas sur le port du voile ou la promotion de la langue arabe dans l’enseignement secondaire. Non, c’est sur la promotion de la finance islamique ; ou plus exactement sur l’idée qu’ils se font de la finance.

Mais qu’est-ce que la finance islamique ? C’est une finance qui est basée sur les principes de loi islamique, la sharia. En d’autres termes, cette finance prohibe l’intérêt et la spéculation et promeut l’éthique et la morale (interdiction d’investir dans des jeux de hasards ou dans l’alcool) au sein des relations financières. Pour exemple, lorsqu’un emprunteur ne rembourse pas dans le temps imparti sa dette contractée, il est interdit pour le prêteur de lui faire payer plus que l’emprunt initial en guise de sanction. Les musulmans appellent cela le ribaa ; nous connaissons cela sous le terme d’intérêt.

Cette finance islamique se veut donc une finance saine, loin de l’image d’Epinal d’un Wall Street qui spécule sur les junk-bonds, entraînant la crise économico-financière de 2008. Et cette finance plaît puisque son poids est croissant depuis 2008, passant de 700 milliards d’euros à 1,540 milliards en 2012 (http://france-moyenorient.com/Finance-islamique-515-milliards-de-dollars-d.html).

Alors, est-ce à dire que nous devons convertir nos banquiers au tapis de prière ? Pas nécessairement, puisque la finance islamique n’est rien de plus qu’une finance éthique, basée sur des principes universels que l’on retrouve dans plusieurs autres religions. En effet, Vladimir Poutine – ostracisé diplomatiquement et financièrement – pense à promouvoir une finance orthodoxe (http://www.lorientlejour.com/article/902242/la-russie-veut-creer-la-finance-orthodoxe-a-linstar-de-la-finance-islamique.html) qui reprendrait les mêmes bases de la finance islamique.

Après quelques recherches en la matière, je me suis rendu compte que la finance islamique, loin d’être une création ex-nihilo des musulmans, n’est rien de moins que l’application de la tradition chrétienne concernant l’interdiction de l’usure. En effet, Saint Thomas d’Aquin dès le XIIIè siècle théorisa la condamnation du prêt à usure : « Recevoir un intérêt pour l’usage de l’argent prêté est en soi injuste, car c’est faire payer ce qui n’existe pas ; ce qui constitue évidemment une inégalité contraire à la justice » (Somme théologique (IIa-IIae, qu. 78), se basant sur l’Ancien Testament (Exode 22.24).

Ainsi, les chrétiens avaient déjà théorisé une finance éthique. Je dis « chrétiens » mais je devrais dire catholiques car c’est bien la Réforme protestante qui initia, sous l’impulsion de Jean Calvin, l’abolition de cette interdiction du prêt.

Face aux dérives d’une finance apatride, dévoyée et amorale il existe bien une autre voie. Il est temps d’approfondir le sujet, de chercher de nouvelles réponses en adéquation avec des valeurs que nous avons trop longtemps écartées pour la seule raison du profit.

Néanmoins, je ne prétends pas être un expert dans le domaine mais je pense que cela est possible et que nous devons le prendre en compte car nous nous trouvons au crépuscule d’un système, le néo-libéralisme et le nouveau système qui naîtra sera celui que l’on s’est donné.

Edgard Comte

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.