Tribunes

Quand la nouvelleté était un crime

Connaissez-vous le mot « Shingi –新儀 » en japonais ? En réalité, peu de Japonais eux-mêmes savent ce que ce mot signifie, et ce malgré son sens apparemment transparent : l’expression signifie mot à mot « nouvelle façon » ou « nouvelle coutume », quelque chose comme « nouvelleté » pourrait-on dire. L’expression n’est plus employée en japonais contemporain, mais elle se trouve très souvent dans les textes anciens et, en particulier, dans les chartes des seigneurs du Moyen Âge où elle désigne… une malversation.

Dans les anciens textes, « nouvelleté » est l’expression consacrée pour désigner l’acte délictueux, voire criminel, de celui qui fait une injustice ou une malhonnêteté en mentant, par exemple, sur la frontière de sa terre (cas classique) sans se référer aux anciennes coutumes ou à la mémoire collective. Une injustice en somme. Vous savez certainement qu’en Occident, dans l’ancien temps aussi, le mot « nouvelleté » et tout ce champ sémantique était marqué du fer de l’opprobre et portait en soi un contenu négatif. D’autant plus que ce sens ne se limitait pas à l’ordre naturel — toute nouvelleté qui va contre la sagesse immémoriale et les coutumes d’antan ne peut qu’être mauvaise — mais aussi à l’ordre surnaturel : rien de nouveau après Jésus-Christ ne pourrait être bon, puisque Jésus-Christ, vrai Dieu, est la bonté suprême, la vérité toute pure, la voie à prendre pour aller à notre terre promise. Rien ne peut venir après qui soit véritablement « nouveau » : tout n’est que développement, clarification, polissage des choses vraies et bonnes, ou encore actions dans et pour Jésus-Christ. C’est dans ce travail que l’homme trouve tout son génie : l’homme ne devient exceptionnel et grand que quand il est héritier, que ce soit dans l’ordre naturel ou surnaturel.

Sinon, regardez le monde autour de vous, qui se pique de nouveautés ou « d’innovation » à tout bout de champ : résultat des courses ? Médiocrité, petitesse, excès, mauvaise qualité, laideur, individualisme, guéguerres (ou guerres tout court, parfois)… Regardez en revanche les cathédrales, églises et paysages d’antan : ils ont été façonnés par des héritiers qui savaient n’être qu’un petit maillon de la chaîne, héritiers des anciens, de millions d’hommes, membre d’une société, infime poussière dans l’humanité et l’histoire, qui ne vaut rien sans tout ce qui le soutient, sans cette foi, sans cette cité… Et cet héritier, loin d’être écrasé, savait très bien la haute mission qu’il avait : il suffit qu’un maillon se brise pour que toute la chaîne éclate, que tout le bâtiment s’effondre, d’où sa si grande importance. Ne soyons pas le maillon qui détruit l’édifice.

À l’est comme à l’ouest, les anciens n’aimaient pas la nouveauté, et cela était sain. Seule la Vérité et la raison pouvaient faire accepter une bonne chose, comme la foi catholique chez les païens, qui d’ailleurs ne supprimait rien des sagesses immémoriales, mais ne faisait que purifier les erreurs naturelles et exclure les erreurs des fausses religions.

Vivement le temps où les nouveautés — à commencer par la république et le démocratisme —, seront un mauvais souvenir honnis.

Paul de Beaulias

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.