Tribunes

Du feu dans la cheminée

Le temps n’est plus aux chaumières, où trônait magistrale, la cheminée centrale, avec ses odeurs et ses fumées. Même les longères normandes ne trouvent plus preneurs, en résidences secondaires. Pourtant, le petit nombre, qui possède encore ce privilège d’être asservi par sa cheminée ; ceux-là, donc, sont pris de compassion, quand ils pensent à tous ces humains, qui ne connaissent que le programmateur du thermostat d’ambiance, ou la roulette de leurs radiateurs électriques. 

Car alimenter l’âtre des aïeuls, poser les buches, comme eux l’ont fait avant nous, n’est pas chose de tout repos. D’autant que l’on peut aussi pousser la plaisanterie, jusqu’à couper soi-même le bois de sa terre. Sans jamais de laisser-aller, tous les ans abattre et couper et fendre, tous les ans stocker, pour d’abord seulement laisser sécher. 

Mais la récompense est toujours au rendez-vous. À chaque automne, les volutes rejoignent les nuages. Elles célèbrent la vieille bâtisse, qui a traversé le temps, soutenue courageusement par l’attention de ses enfants. Ou plutôt, les enfants des enfants, et encore des enfants, de ceux qui l’on construite ou bien fait construire.    

La cheminée, l’âtre, l’âme de la maison, continue de vivre. Et avec elle, peut-être un peu, de l’esprit de toutes celles et de tous ceux, qui ont versé là un peu de sueur, par respect et devoir de mémoire, envers les anciens, envers ceux qui ont fait de même, avant eux. 

Mais, « trêve de cheminée », ou l’on aurait tôt fait de me mettre au nombre des admirateurs du vieux Maréchal. L’homme était, parait-il, un nostalgique de la France des chaumières. De cette époque, où les nobles se mortifiaient, en restant l’hiver, dans leurs froides gentilhommières aux plafonds hauts. 

Et puis, les évolutions constantes nous ont fait passer, en quarante années, du simple au triple vitrage, voire aux vitres blindées. Dans nos habitations aseptisées, conformes aux normes RT 2000 puis RT 2012, tout fait oublier les rudes heures du passé. D’ailleurs, de zélés fonctionnaires européens n’avaient-ils pas, il y a peu, prévu d’interdire, les cheminées à foyer ouvert ? Peut-être afin de réduire le nombre des derniers « Raboliot », qui se chauffent encore ainsi, dans nos campagnes. Les amener sur les trottoirs des villes, et enfin, les civiliser un peu, par le baptême de la mixité sociale internationale.   

Bref, n’y a-t-il pas, cependant, un parallèle que l’on pourrait établir, entre « la maison France », et l’habitation d’un français contemporain ? N’y manque-t-il pas quelque chose de spirituel, et de charnel également ?

Mais coupons là ! La France ne serait, dit-on parfois, plus qu’un jardinet, nullement autosuffisant, si toutefois il avait encore une volonté et suffisamment de courage, pour y faire pousser des légumes.

Dans le grand magma, occidental mais au-delà, planétaire, les « élites », au mauvais sens du terme, se satisfont de voir s’accumuler dans les mégapoles, des citoyens « lambda ».  « Riches », ils vivent assez souvent leur vie par procuration sur les réseaux sociaux, le Smartphone à la main, dans des studios de vingt mètres carrés. Pauvres, ce sera parfois le bidonville, avec quelquefois le même appareil. Oui, nous sommes tellement loin, et à la fois si près, en nombre d’années, du temps où l’on privilégiait la beauté. Où voir le soleil de printemps, faire briller les ardoises, dans le ciel clair, valait bien quelques engelures durant l’hiver. Où honorer un nom, qu’il soit celui d’un hobereau, ou d’un paysan, était souvent le travail de tout une vie.  

Ainsi, il n’y aurait donc plus d’hommes et de maisons enracinés. Plus de pieds de paysans à arpenter la terre. Plus de granit ou de pierre calcaire à tailler. Plus d’argile à malaxer avec la paille. Plus de chaux vive à badigeonner. Des maisons, certes, ça existerait encore, fabriquées en usines, vite assemblées, démontables et transportables. Et que des hommes proprets et formatés, passant d’un avion à l’autre, pour faire le tour de la terre, de Paris à New York, de Londres à Singapour. Bien sûr, ils se souviendraient, peut-être vaguement, parfois, de ces ancêtres un peu bouseux, d’un coin de campagne, à présent gagné par la ronce et la forêt.  

Car la finance internationale, comme la république d’ailleurs, ne sont pas filles des terroirs. Cette dernière, on le sait, n’aime pas les racines, à moins que ça ne soit les siennes. Elle oublie, souvent,  que celles-ci demeureront à jamais, nourries du sang, d’un grand nombre des meilleurs Français, qu’ils soient nobles ou du peuple, à l’image de ceux de Vendée. 

Que ne nous dira-t-on pas ? Que la page avait été tournée, il y a trop longtemps. Que ce roi et cette reine qui avaient versé leur sang, l’avaient fait pour cet « établissement », qui lui, avait perdu l’habitude de payer l’impôt du même nom.

Que l’homme de demain, que l’on veut à tout prix nous imposer, aurait, que sais-je, la tête jaune, les pieds noirs et le corps basané, qu’il en allait de la paix du monde, entrevue par le prophète John Lennon, dans sa chanson prémonitoire bien connue.

À l’heure où l’on envoie des bombes à mille lieux de chez nous, et qui tombent sur les têtes, de finalement l’on sait trop qui ; peu nombreux sont ceux qui vous parlerons de Philippe Auguste à Bouvines. Ou de Charles d’Orléans à Azincourt ; un autre temps assurément, où les chefs étaient sur le terrain avec la troupe.

Evidemment, personne ne souhaite de nouvelles guerres, aussi meurtrières, que celles du siècle dernier. Les édiles ne cessent de se réunir depuis des dizaines d’années. Ils sont tous ou presque, au diapason. « Economie », là est la réponse à toutes les questions. Partout sur la planète, il faudrait des ventres bien remplis. Alors, à quoi bon, pays, patries, histoire et terroirs, églises cimetières et pierres tombales.  

Le grand législateur, celui qui supervise cette étrange pandémie ; celui qui vide les campagnes du monde entier à destination des villes, puis dirige les populations des villes des pays du sud, vers les villes des pays du nord. Eh bien, ce grand timonier, aux manœuvres démoniaques, ne peut être que le diable, oui le diable en personne.  

Mais rassurons-nous, la main de Dieu est partout, autant dans la nature qu’il a façonnée, que dans l’être intime de chaque individu. Malheureusement ou heureusement peut-être, elle n’est pas dans les idées, ni dans les règlements créés par les hommes.

Ainsi, comme dans les villages abandonnés, où la faune et la flore sauvages reprennent le dessus ; quand un Dieu disparaît du cœur des hommes, parce que l’on a cessé d’y entretenir la flamme, un autre Dieu lui prend sa place, fût-il un imposteur.

Heureusement, les gardiens du temple, ces vieilles âmes, reprennent  encore et toujours du service. Souvenons-nous, il n’y pas si longtemps, de l’auteur du « Serment de Koufra ». Cet homme qui avait la baraka et qui croyait combattre Satan réincarné. Souvenons-nous encore, plus récemment, de Jean Paul II embrassant la terre de France au Bourget, et de sa mise en garde, à présent, ô combien, inscrite dans l’histoire.       

Alors qu’à l’occasion de l’anniversaire de la mort de Louis XVI, son testament est de nouveau mis en avant ; force est de constater, que cet homme, qui n’avait pas choisi sa condition, s’est efforcé à l’heure de la mort d’être fidèle aux enseignements reçus. Enseignements bien reçus, semble-t-il, au regard de la foi qu’il témoigna en Dieu, en Jésus Christ, et au-delà en l’Église, faisant une fois de plus honneur à l’expression : «  Bon sang ne saurait mentir ».

Enfin,  gageons en chrétiens que nous sommes tous plus ou moins, parfois même sans le savoir ; qu’au jour où les forces du Mal auront bouclé la boucle, quand elles auront mis à feu et à sang ce qu’elles ont elles-mêmes élevé ; gageons que nous relèverons la France de ses cendres. 

De jeunes hommes viendront, ils regagneront nos campagnes, des hommes et des femmes de nouveau travailleront dans les champs. Nous restaurerons nos églises et nous en construirons de nouvelles, le Seigneur bienveillant apportera l’abondance en nos familles.

Ainsi, il y aura de nouveau du feu dans les cheminées des maisons de France, et en premier lieu dans

«  La Maison de France ».

« Entrons dans l’espérance.» 

Jean de Baulhoo

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