Societé

Art contemporain ou art comptant pour rien ? (3/3)

Art et société : Un parallèle inquiétant !

Après avoir revu ses classiques avec Kant, puis survolé l’histoire de l’art, à présent entrons dans la polémique : Que nous dit l’art contemporain ?

Comprendre l’art contemporain, c’est comprendre son époque mais aussi la société.

Qui ne s’est pas exclamé un jour : « Mais qu’il était en avance sur son temps ! » ?

Un artiste n’est pas en avance sur son temps. Sa sensibilité exacerbée lui fait exprimer des réalités qui ne sont pas encore perçues de tous. C’est là souvent son véritable talent.

Notre société actuelle n’oscille-t-elle pas entre le « Rien » de Casimir Malevitch et le « N’importe quoi » de Marcel Duchamp ?

Luc Ferry écrivait dans le Figaro en 2009 :

« Le XXe siècle a été celui de la déconstruction des valeurs et des autorités traditionnelles à nul autre pareil. Il suffit d’adopter une vue cavalière sur l’histoire de la « haute culture » pour mesurer l’ampleur des révolutions dont notre vieille Europe fut le théâtre : en quelques décennies, on y a déconstruit la tonalité en musique, la figuration en peinture, bouleversé les règles de la littérature, du théâtre, de la danse et même du cinéma. Bien au-delà du domaine artistique, ce sont toutes les figures traditionnelles du « surmoi », des morales conventionnelles, religieuses ou « bourgeoises » qui furent ébranlées comme jamais par le passé. »

L’art, « una cosa mentale » pour Léonard de Vinci…

De fait, les artistes contemporains ont exploité à fond cette idée en considérant que l’art pouvait n’être qu’un concept. Il déprécie l’image au profit de l’idée, adoptant des supports technologiques qui ne font plus appel à la maîtrise des règles et des techniques classiques comme le dessin par exemple. Fort logiquement, l’explication de la démarche et les mots ont pris le pas sur l’œuvre, dont la réalisation matérielle ne s’avère même plus nécessaire. Du vent, rien que du vent !

Ainsi une part importante de l’art contemporain est à l’image de notre société : conceptuel, virtuel, laid, violent, pornographique, ou encore simpliste et purement décoratif, affranchi de toutes règles, magnifiant la déchéance du réel dans le beau discours branché du politiquement correct.

Mais au final, est-ce encore de l’art ?

Le XXe siècle marque l’avènement de l’art comme instrument politique, « una cosa politica ».

Rappelons qu’une des premières décisions des soviets fut de créer un département des Beaux-Arts : les artistes se devaient alors d’être les animateurs de la société nouvelle.

Le nazis aussi se sont « intéressés » à l’art, n’hésitant pas à brûler tout ce qu’ils considéraient comme décadent, tout en mettant de côté pour leurs propres collections quelques œuvres fondamentales de l’art contemporain de l’époque…

La Chine de Mao, avec sa révolution culturelle, a coupé violemment tous les liens avec son histoire ancestrale, mettant au banc de la société les grands maitres de la calligraphie pour ne plus mettre en avant qu’un art officiel ultra-normé, dénué de toute créativité, au service du régime. Mais la roue tourne et la Chine se libère : les artistes contemporains chinois battent tous les records ! Mode passagère ou basculement du centre de création de l’Occident vers l’Orient ?

Aujourd’hui, l’art contemporain est aussi et surtout une affaire financière, « una cosa financiere » entre initiés. C’est un marché mondial. Le talent artistique laisse la place à la stratégie marketing. Et comme il s’agit ici d’art, Anne Saint Clair[1], tentant de minimiser sa fortune, déclarait en 2011 en un magnifique résumé « que c’est du bon argent, de l’argent de gauche » !

On citera aussi la collection Bergé Saint Laurent, dont la vente aux enchères en février 2009 par Christie’s détient à ce jour le record mondial pour une collection privée avec un résultat de 373,5 M€… Mais là, il faut bien admettre que le goût était d’une grande sûreté. Respect, même si le personnage n’en inspire pas par ailleurs !

François Pinault, Bernard Arnault… Pour le goût de l’art, de l’argent, par politique (le « bon argent ») ou par orgueil, à la recherche d’une reconnaissance universelle ?

Et la France dans tout ça ? Je conseille à tous d’oser visiter un jour un (fric-) FRAC[2]. Chaque département ou presque a le sien. Pourquoi oser ? Parce que ces lieux remarquables, financés à perte par l’argent public, sont vides de tout et plein de rien. Il n’y a guère que les « gratuits » qui les visitent, autrement dit « les scolaires », vos enfants, qui grâce au ministère de l’Éducation (l’endoctrinement) nationale reçoivent ainsi pour vrai et beau ce qui n’est, à quelques rares exceptions près, qu’une remarquable imposture.

L’art contemporain n’est qu’anarchie et égocentrismes. Il est l’image de notre monde, de ce qui le rend signifiant donc légitime au-delà de toutes considérations esthétiques.

Reste à savoir ce qui restera à la postérité pour représenter notre époque aux générations futures.

Reste à savoir quels sont les artistes face aux œuvres desquels on s’écriera demain : « Mais qu’il était en avance sur son temps ! ».

Reste à savoir si ce qu’il nous laisse voir du futur est ce que l’on veut qu’il soit !

Alors soyez curieux : allez dans les foires, les biennales, les musées, osez pousser les portes des galeries et observez !

Arnaud de Lamberticourt


[1]  Anne Saint Clair est l’héritière de Paul Rosenberg, marchand d’art historique du XXème siècle (Picasso, Léger…) et sa collection privée est une des plus importantes de France…

[2]  Fonds Régional d’Art Contemporain : leur gestion fait périodiquement l’objet de remarques des Chambres régionales des comptes, voire de la Cours des Comptes. Comptabilité, gouvernance, politique d’acquisition… Une opacité incroyable et un authentique scandale de la Vème république !

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