Histoire

Saga Autarcie : La pression extérieure et la signature des traités

L’étude suivante se compose de 18 articles se suivant, à paraître à rythme hedomadaire. Articles précédents

Article 1 de la saga: L’autarcie au Japon ou le Sakoku 鎖国, première approche

Article 2 de la saga:  Les origines de l’autarcie nipponne

Article 3 de la saga:  Les origines du mot  d’ « autarcie » au Japon

Article 4 de la saga : Autarcie, question de point de vue

Article 5 de la saga : L’autarcie, politique pratique pour la protection du pays, tout simplement

Article 6 de la saga : De l’autarcie à l’ouverture du pays – toujours pour la protection du pays et pour le service du divin

Article 7 de la saga : L’influence de la pensée autarcique en Europe : Fichte contre la pensée kantienne

Article 8 de la saga :  Chauvinisme et pensée du Joi à la fin de l’ère Edo

Article 9 de la saga :  L’autarcie comme prolongement du chauvinisme légitimiste, réflexion sur la souveraineté

Article 10 de la saga :  Au centre et à la source, le Roi, autarcie et chauvinisme n’étant que des politiques pratiques.

En cette fin de l’ère Edo, au milieu du dix-neuvième siècle, les incidents se multiplient et la tension monte peu à peu dans un régime quelque peu affaibli par une longue paix et peut-être une certaine rigidification du fonctionnement général, comme une sorte d’arthrite due à l’âge et au manque de mouvement :

 « Ces divers incidents ne sont que quelques exemples parmi d’autres, mais face à cette multiplication du passage et de la venue des navires étrangers, le Tennô Kômei, inquiet par la situation, demanda au Bakufu en l’an 3 de Kôka (1846) de pourvoir à cette situation. Le Bakufu répondit avec diligence à cette demande et fournit de plus amples rapports de la situation à la Cour. Cela constitue le premier exemple d’une ingérence de la Cour en matière d’affaires extérieures  sur le Bakufu, et créa un précédent aux conséquences importantes, en particulier lors de la signature des traités de commerce, où on exigea du Bakufu d’obtenir un édit royal pour ce faire. Enfin, Perry arriva chez nous dans cette situation (1848).  »[1]

Perry, enfin arrive pour demander la conclusion d’un traité sous la menace des canonnières, dans un coup de force magistral mais peu honorable:

 « La demande directe de Perry concernait la conclusion d’un traité d’amitié et de commerce entre les deux pays. Le Bakufu était placé dans une position délicate pour maintenir l’interdiction des mers, mais il réussit à conclure en mars de l’an 7 de Kaei (1854, début de l’ère Ansei le 27 décembre) le traité d’amitié nippo-américain. A ce stade, il réussit habilement à éviter de conclure un traité commercial, et maintient l’interdiction des mers [interdiction fondamentale de la politique d’autarcie] telle quelle, en faisant l’exemple d’une politique de « miséricorde attentionnée [détente] » envers les barbares. »[2]

Soit dit en passant, le Japon eut certainement la chance de pouvoir assister et prendre conscience de tout le danger que représentait l’Occident conquérant à un moment où, tant par sa position géographique que par son importance politique, le Japon dut subir une agression moralement violente mais aux effets concrets encore limités, ce qui lui donna le temps de se préparer activement au choc. Perry serait arrivé 20 ou 30 ans plus tard qu’il aurait été bien plus difficile de faire face, le Japon toujours au même niveau militaire médiéval, face à un Occident proportionnellement encore plus puissant.

L’enchaînement qui suit n’obéit pas à cette vision historique postérieure, qui a forcément tendance à réfléchir sur le passé en fonction du résultat – qui fut pour le Japon, l’ouverture du pays – en voyant tous les événements et les évolutions axés sur ce résultat dernier : les contemporains au contraire ne pensaient pas le moins du monde à cette époque à « s’ouvrir », tout n’était au pire qu’expédient pour donner suffisamment de temps à s’armer, afin de retrouver une situation autarcique du Sakoku :

 « Le contenu du Traité fut ensuite annoncé humblement en Septembre par le Bakufu au Roi de l’an 2 de Ansei (1850), et le Tennô Koumei accueillit la nouvelle avec joie, car le traité était considéré comme une politique de détente temporaire, laissant le temps au Bakufu de mettre toute ses forces à maintenir la politique d’isolement du pays. Si on considère que l’ouverture du pays se fait avec le début des relations commerciales, il n’est ainsi pas exact de dater l’ouverture du Japon de ce traité d’amitié. À ce stade, la politique de Sakoku était fermement observée et maintenue, et c’est ainsi que le voyait tous les contemporains de cette époque. »[3]

 « Lorsque cette politique de détente ne fut plus tenable et que le traité [de commerce] dut être conclu, cette conclusion ne fut considérée que comme un expédient temporaire, laissant le temps de se réarmer pour ensuite le rompre : l’interruption de l’isolement était vue par les contemporains comme une simple interruption limitée dans le temps. Cela peut sembler un expédient du Bakufu pour ménager la Cour, mais l’Ancien Ii visait en réalité à renforcer sa puissance navale [pour faire face aux Occidentaux], la raison pour laquelle il accepta de signer le Traité. »[4]

L’enseignement sur la façon de faire de l’histoire en se souvenant de ce que voyaient et vivaient les contemporains est d’ailleurs très instructive, en relativisant les doxas, indication que tout historien devrait avoir à la mémoire dès qu’il se confronte au passé et aux récits postérieurs sur le passé :

 « La doxa a tendance à être très sévère face à ce traité, dit inégal, dont le négociateur fut Iwase, dont on critiqua l’ignorance et le manque d’ouverture. Si nous devions prendre la défense de Iwase pour son honneur, nous rappellerions que les gens de cette époque n’avaient pas le moins du monde à l’esprit l’idée d’aller à l’étranger et de  traverser la mer. Commerce, peut-être, mais seulement dans les ports japonais, puisque il était impensable d’envoyer des commerçants à l’étranger, vue l’interdiction de sortir du pays pour les Japonais. Il n’y avait donc aucun besoin de se soucier de droits extraterritoriaux équivalents entre les pays ou ce genre de chose. »[5]

[1] Ibid, p.51 « これらは、ほんの一例であるが、このように頻繁に外国船が来航する状況を憂え、弘化三年、孝明天皇は幕府に対して、その対応を求めたのだ。幕府はこれに対し、すぐに外国船の来航状況などを回答した。これは、朝廷が対外問題に関し、幕府に物を言う最初の出来事であったこれが前例となり、後年、通商条約の調印が問題になった際、幕府に勅許を求めたのである。そして、いよいよ我が国はペリーを迎える。 » et aussi 1844 un navire français vient demander le commerce à Naha 1849 américain…

[2] Ibid, p.51 « なお、ペリーの直接の要求は、国家間の和親と通商であった。幕府は海禁政策を継承することが困難な情勢に置かれたが、翌嘉永七年(一八五四、十一月二十七日に安政に改元)三月、日米和親条約を締結した。通商条約を巧みに回避しており、海禁の枠の中で、冊封と攘夷の中間ともいえる「撫恤」政策を見出したのだ。 »

[3] Ibid, p.52 « なお、安政二年(一八五五)九月に条約締結の旨、幕府から上奏された際、孝明天皇はその内容を嘉納した。それは、この撫恤政策が一時的な策略であり、幕府の尽力によって、海禁政策は維持されたものとの認識からであった。開国を通商開始とした場合、一般に言われているように、この和親条約を持って開国とすることは正しくない。この段階では、鎖国を堅持したと言うのが同時代人の認識であったのだ。 »

[4] Ibid, p.64 « つまり、撫恤政策を取れなくなったため、やむを得ず一時凌ぎで締結したが、武備を整えた暁には破棄すると言うもので、海禁政策を時限的に放棄するとの認識であった。これたぶんに朝廷を意識した方便のようにも見えるが、井伊もその真意は海軍力強化のため、当面の通商条約を容認していたのだ。 »

[5] Ibid, p.66 « なお、岩瀬が結んだ通商条約は不平等条約であり、その無知さ、非開明性をことさら避難する向きがある。岩瀬の名誉のために弁護すると、当時、日本人が外国に渡航することはまったく念頭になかった。通商と言っても、現実的には外国船による日本の港での取引であり、我が国の商人が外国に乗り出すことは国禁なので想定外であり、双務的な治外法権について考慮する必要などなかったのだ。 »

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