Histoire

Ainsi, Dieu choisit la France : entretien avec l’écrivain Camille Pascal

« Il n’y a qu’une chose vraiment infâme, qui déshonore la créature que Dieu a faite à son image, le mensonge « disait Marcel Proust. Alors, le dernier livre de Camille Pascal est là pour rappeler que la Foi en Dieu a été, pendant près de quinze siècles, le vrai moteur et la seule justification de ceux qui gouvernaient la France. Ce livre est également un ouvrage d’actualité, en scrutant notre passé chrétien, il rappelle aux français que nous sommes aujourd’hui le garant d’une Foi qui ne doit pas disparaître.

Si, dans les faits, les valeurs chrétiennes sont méprisées, Camille Pascal, avec ce livre, en redonne une visibilité inattendue. Il confère à l’Eglise la pureté de son message originel. Avec cet ouvrage l’auteur traversera sûrement le temps, agrégé d’histoire, littéraire dans l’âme, un véritable écrivain qui n’a rien des petits hommes qui peuplent nos institutions. Il nous transmet des valeurs que l’on croyait perdues à jamais.                                                                                                     

Haut fonctionnaire, Camille Pascal, après avoir enseigné en Sorbonne et à l’EHESS, a été le collaborateur de plusieurs ministres. Directeur de cabinet de Dominique Baudis au CSA, puis secrétaire général du groupe France Télévisions, il devient, en 2011, conseiller du président de la République Nicolas Sarkozy, en charge des médias. Il est l’auteur, chez Plon, de « Scènes de la vie quotidiennes à l’Elysée ». Son dernier ouvrage « Ainsi, Dieu choisit la France » est édité également.

 

            1) Dans quelles conditions avez-vous écrit « Ainsi, Dieu choisit la France », est-ce par provocation dans une France déchristianisée ou tout simplement assumer une réalité qui nous dépasse ?

 

J’ai écrit ce livre parce que je ne supporte plus le mépris de notre époque pour le passé et ceux qui l’ont construit. Je voulais rappeler que ceux qui agissaient avec la conviction qu’ils le faisaient au nom de Dieu ou pour lui obéir n’étaient pas des demeurés ! J’ai donc essayé d’écrire ce livre en plongeant le lecteur dans un sentiment de réalité historique de façon à ce qu’il puisse comprendre des réactions, des actes ou des décisions qui paraissent incompréhensibles aux yeux de nos contemporains.

Louis XIII et Richelieu ne prenaient pas une décision stratégique sans consulter les visions de sœur Anne-Marie de Jésus Christ Crucifié, pauvre fille du Calvaire, qui entretenait, disait-on, une relation privilégiée avec la Sainte Vierge. Aujourd’hui les hommes politiques consultent les sondages et les pythies qui sont censées les déchiffrer. En quoi les uns sont-ils plus rationnels que les autres ?

 

            2)  Est-ce l’homme politique ou le chrétien qui parle ?

 

L’historien !  A aucun moment dans mon livre, je n’impose au lecteur de croire que Dieu était à l’œuvre dans la construction de la France. C’est là un acte de Foi qui n’a rien à voir avec l’Histoire, mon livre n’est pas un catéchisme et je ne suis pas le pseudo marquis de la Franquerie. En revanche, j’ai voulu montrer comment le sentiment d’élection divine et de prédestination avait forgé le pays. Je ne sais pas si “Dieu a choisi la France” pour agir dans le monde comme l’écrivaient au moyen-âge Guibert de Nogent ou le Pape Grégoire IX mais ce qui est certain, en revanche, c’est que la France est d’abord et avant tout une construction de l’Eglise catholique, une sorte de cathédrale politique…

Et cela, plus personne ne le sait et surtout plus personne ne veut le dire ou l’enseigner.

 

            3)  La conversion de Clovis a-t-elle été déterminante pour le destin de la France ?

 

Fondatrice. Clovis n’est rien au début de son règne, simplement l’héritier d’un principicule barbare, vaguement latinisé qui commandait ces troupes auxiliaires dont Rome garnissait, faute de mieux, les frontières de l’Empire. En convertissant ce roitelet païen au catholicisme alors que tous les rois barbares d’Occident avaient été convertis à l’arianisme, version simplifiée et hérétique du christianisme, Rome se trouve un formidable allié de revers. A ce moment-là, le nouveau baptisé devient l’élu de Dieu et son peuple, le nouveau Peuple Elu de la Nouvelle Alliance. Les villes et les Provinces gauloises tombent alors comme par miracle aux mains de ce nouveau David. La France est née car les populations gallo-romaines, chrétiennes et encadrées par un épiscopat de grande qualité, ont trouvé un chef.

Sans la conversion de Clovis qui identifie un roi, un peuple et une religion, l’Histoire aurait pu être différente et rien n’aurait empêché que les anciennes Gaules forment des royaumes différents.

C’est à ce moment-là que la France prend conscience d’elle-même et surtout de la mission particulière qui est désormais la sienne. Si l’on ne comprend pas cela, on ne comprend pas d’où l’on vient et qui nous sommes.

 

            4)  La montée de l’Islam en France a-t-elle été un élément déclencheur dans votre démarche ?

 

Non. C’est la montée de l’inculture et le triomphe de l’idéologie dans le discours historique universitaire et donc “officiel” qui a déclenché mon envie d’écrire. Pour être tout à fait franc – et cela sans aucun jeu de mots ! – je serais même comblé si mon livre était lu par des musulmans vivant en France. Je suis convaincu, contrairement à ce que tout le monde raconte, que la découverte de cette histoire catholique de la France non seulement leur permettrait de mieux comprendre le pays dans lequel ils vivent mais les rassurerait !

 

            5)  Dans la présentation de votre ouvrage est noté : Camille Pascal renoue délibérément avec le ” récit national ” que veut-on dire ?

 

Deux choses. La première, c’est que l’Histoire est d’abord un récit. La deuxième, c’est qu’elle a un objet : le peuple et la nation. Or aujourd’hui, l’Histoire universitaire est tenue par les faibles épigones des grands pionniers de l’Ecole des Annales qui ne racontent rien et se contentent de répéter à l’envie les mêmes sourates mais sans le talent des premiers prophètes ! Ils ont même forgé une sorte de langue sacerdotale empruntée au sabir des sciences sociales à laquelle plus personne ne comprend rien et qui a fait fuir le public. C’est là une trahison particulièrement grave car ces historiens ne sont pas payés par la nation pour la déconstruire mais pour lui permettre de rester debout !

 

             6)  Affirmer que la France est une terre chrétienne est donc une réalité ?

 

Une évidence. La France est une terre à ce point chrétienne qu’elle était le seul terreau possible pour la Philosophie des Lumières qui n’est en réalité qu’une tentative de laïcisation du christianisme et du message des Evangiles. De là d’ailleurs, la violence de la “laïcisation” du pays en 1793 bien sûr, mais aussi entre 1882 et 1905, car la laïcité républicaine a tenté de s’imposer comme un nouveau discours religieux et de se substituer au catholicisme. Pour autant, comme on n’échappe pas à son Histoire, la mission divine de la France est devenue la vocation universelle de la France, la France nouvelle Terre Promise est devenue dans sa version “laïcisée”, la France patrie des Droits de l’Homme, les instituteurs ont même forgé un nouveau clergé etc…

 

             7)  Un historien est-il le garant des faits d’une époque, peut-il déguiser l’histoire, la falsifier comme pourrait être tenté de le faire un homme politique important ?

 

Les faits et les sources historiques qui permettent de les reconstituer sont têtus. Un peu comme les chiffres… On peut les interpréter de mille façons mais on ne peut pas les falsifier. Tout ce qui est écrit dans mon livre est rigoureusement exact du point de vue historique et je remarque que personne n’est venu le contester. Si parfois j’ai pris des libertés, comme sur l’origine du fameux vase de Soisson, c’est qu’un faisceau d’indices me permettait de le faire. J’ai donc, en réalité, transposé une hypothèse sous forme de récit.

 

             8)  Vous précisez dans le titre de votre ouvrage que c’est la véritable histoire de la Fille aînée de l’Eglise. Vous supposez qu’il existe d’autres versions ?

 

Oui bien sûr, il y a une légende noire, celle qui veut que l’Eglise Catholique ait maintenu la France dans l’obscurantisme féodal et soit responsable de toutes les violences… Tout cela relève évidemment de la propagande. Le travail de civilisation entrepris par l’Eglise catholique dès l’Antiquité tardive a été si profond et a changé si radicalement les hommes et leurs comportements qu’il est devenu invisible aux yeux de nos contemporains. Pourtant, si nous nous comportons encore de façon “civilisée”, c’est à l’immense travail de domestication de nos pulsions et de valorisation de la personne humaine entrepris par l’Eglise que nous le devons. Alors bien sûr, en décrivant les horreurs de la Saint-Barthélemy, je n’ai pas voulu exonérer l’Eglise de ses responsabilités mais j’ai aussi voulu montrer que ce massacre terrible fut d’abord un incroyable déchaînement de violence populaire d’une ampleur presque révolutionnaire et que pendant ces quelques jours, Charles IX se montra bien incapable de régner dans Paris…

 

             9)  Quel regard portez-vous sur la monarchie aujourd’hui ?

 

De quelle monarchie parlez-vous ? Celle, quasi élective, des premiers capétiens ? Celle, féodale, de Philippe Auguste ? Celle, terriblement “césaro-papiste”, de Philippe Le Bel ? Celle, tempérée par les Etats-Généraux, des derniers Valois ? Celle, “absolutiste”, des Bourbons ? Ou encore celle, “révolutionnaire” et “censitaire”, dont rêvèrent les Orléans ? La monarchie est une forme d’incarnation particulière de l’Etat qui n’a cessé d’évoluer et de se transformer jusqu’à ce qu’elle n’y parvienne plus. En France, elle est morte mais l’Etat lui a survécu. C’est son plus bel héritage. Dans d’autres pays d’Europe, elle continue à incarner l’Etat et je remarque que c’est d’autant plus vrai que ces Etats ne correspondent pas à une seule réalité nationale.

 

             10)  Serait-il concevable que France se prépare à l’arrivée d’un roi ?

 

Mais il est élu régulièrement au suffrage universel depuis 1962… Non ?

Chacun sait que la constitution de la Ve République est un compromis savant entre la Monarchie de Juillet et le Second Empire… Certes, de Gaulle n’a pas osé rétablir un droit héréditaire mais il a beaucoup hésité !

D’ailleurs, vous remarquerez que les monarchistes qui ont été longtemps les principaux opposants à la IIIe et même encore à la IVe République ont quasiment disparu en tant que force politique avec l’avènement de la Ve. C’est qu’il doit y avoir une raison.

 

             11)  Qu’est-ce qu’un vrai catholique en 2017 et que peut-on attendre de lui pour sauver l’Eglise ?

 

Je ne suis pas certain d’être le mieux placé pour répondre à cette question. Il me semble qu’un vrai catholique est un chrétien qui tente de mettre sa vie en conformité avec les Evangiles et qui fait confiance à l’Eglise de Rome pour les lui enseigner. Quant à l’Eglise, son immense force, c’est sa maîtrise du temps et l’universalité du message dont elle a la garde. Napoléon Ier prétendit un jour qu’il enterrerait le dernier Pape. On voit où cela l’a mené.

 

             12)  Qu’attendez-vous de vos lecteurs ? Qu’ils réagissent ?

 

D’abord, qu’ils prennent autant de plaisir à me lire que j’ai pris de plaisir à écrire ce livre pour eux. Pour le reste, une fois que mon livre est dans les mains d’un lecteur, il ne m’appartient plus, chacun peut alors se l’approprier et en tirer les leçons de son choix. C’est la fabuleuse liberté de “ce vice impuni” qu’est la lecture comme l’écrivait si joliment Valéry Larbaud.

 

Eric Muth

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.