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Avoir raison et n’être pas écouté, et devenir chef et être trop écouté, par Antoine Michel

Il arrive que certains génies particuliers, dès leur jeunesse, parviennent à percer de façon assez lumineuse des réalités qui restent obscures à beaucoup de leurs contemporains.

En particulier en matière prudentielle dans le domaine politique, quand il s’agit de réfléchir aux directives d’une action, et aux décisions concrètes pour la direction d’un groupe, d’un pays, ou d’une quelconque société politique.

Certains plus ou moins jeunes ont parfois des idées justes des situations – malgré la tendance à en avoir trop, et de tomber parfois dans un excès de confiance du fait du manque d’expérience -, et il arrive souvent, ce qui est dans l’ordre des choses dans un certain sens, qu’ils ne soient pas écoutés.

Le bon chrétien se soumettra à l’autorité. Les événements avanceront, et lui donneront raison, et on commencera peut-être à plus l’écouter.

C’est le syndrome du « je l’avais dit, mais personne ne m’écoute ».

Ce jeune vieillissant, et continuant à parfaire ses capacités d’analyse et de décisions, améliorera aussi ses conseils, et un jour, peut-être, il aura le malheur de devenir chef, et de se retrouver dans une situation où il faut décider, où il faut diriger.

Ce jour-là, il comprendra le poids des décisions, et ce que signifie en pratique l’exercice de la prudence : aussi vraie que soit une analyse de situation, et les décisions a priori à prendre, quand il s’agit de décider pour toute une société politique donnée – à commencer par la famille – la prise de décision n’est jamais aussi facile.

Nous considérons évidemment que la situation ici décrite se trouve dans un contexte traditionnel : l’autorité est respectée, l’obéissance chrétienne observée, et la soumission quasi-automatique, puisque l’autorité, même quand elle se trompe, ne le fait pas de mauvaise foi.

Ce nouveau chef se rendra compte que dès qu’il dit quelque chose, on l’écoute…trop. Et que tout le monde applique, et qu’il est rare que le bon conseiller vienne contredire ses erreurs avec justesse et sans mouvement d’orgueil, par pur soucis du bien commun.

Quand il était jeune, il se disait : « je l’avais dit, mais personne ne m’écoute ».

Maintenant il se dit : « Mais pourquoi ils m’écoutent toujours sans broncher? Je sais que je peux me tromper ! »

Et ce bon chef, toujours tremblant devant chacune de ses décisions, mais sachant qu’il faut trancher et s’y tenir avec force, appréciera le bon conseiller, même inconnu, qui donne les bonnes idées d’autant plus facilement qu’il n’est pas écouté.

Car celui qui est écouté, avec les mêmes idées, ne les dira qu’avec plus de parcimonie puisqu’il aura toujours peur, puisqu’il est écouté, que des conséquences imprévues surgissent, et qu’il pourrait envoyer ses subalternes dans le mur à son insu : il préférera tester, agir prudemment et par étapes.

Celui qui n’est pas écouté, et qui n’a pas de responsabilité donc de décision, peut parler plus facilement, puisque ce qu’il dit n’aura pas une conséquence directe et rapide sur la réalité.

Le poids de la direction est vraiment quelque chose de lourd !

Il fallait bien une haute vertu chrétienne pour permettre la fondation de la royauté chrétienne française : assumer cette direction politique avec force, en sachant garder la force dans l’affirmation des décisions à prendre sans considérations des aspects mondains, et sans se faire écraser par le poids de sa responsabilité, mais sans l’oublier pourtant non plus.

En monde païen, c’est l’inverse : soit le dirigeant, écrasé par le poids, trouvera des ersatz pour évacuer la responsabilité sur d’autres (regardez Ponce Pilate et son « je m’en lave les mains », ou encore le fonctionnement démocratique, qui est une tentative de dissolution de l’autorité, ou encore les phénomènes de bouc-émissaire qui font porter le chapeau à une personne en particulier ou un groupe particulier, ou encore cette tendance au dirigeant-marionnette, symbole sans pouvoir, ce qui permet aux vrais dirigeants d’agir sans prendre la responsabilité, et à la marionnette de garder le prestige sans rien décider…) ; soit il deviendra un tyran oubliant toute responsabilité personnelle et venant à croire que tout ce qu’il décide, parce qu’il l’a décidé, est forcément bon (cas classique du tyran, mais aussi de tout totalitarisme qui reçoit la décision du souverain, même si c’est le peuple, comme une vérité absolue).

Alors revenons à la royauté très chrétienne, seules institutions bien christianisées qui tiennent le juste milieu en matière politique !

Et soyons content de ne pas être écouté, tant que le bon Dieu nous le permet, car heureux les petits !

Et quand vous aurez le malheur d’être écouté, assumez-le avec force, sans pusillanimité et sans fuir !


Comme un vrai sujet du roi, comme un vrai chevalier et seigneur !

Pour Dieu, pour le Roi, pour la France

Antoine Michel

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