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Que se passe t-il en Syrie ?

La question peut paraître tout à fait ridicule, voire partiellement négationniste : en effet,  à part l’éventualité d’une retraite approfondie dans une lamaserie sur les flancs de l’Himalaya, ou de vacances d’été sur l’île de Svalbard, nul ne peut ignorer les récents évènements en Syrie.

D’ailleurs, pour les meilleurs d’entre nous, c’est-à-dire ceux qui sont catholiques, nous sommes au courant des exactions commises par les belligérants en Syrie depuis des mois.

L’usage des armes chimiques constitue, sans nul doute, l’ascension d’un échelon supplémentaire dans l’escalade.

Mais nous devrions nous interroger sur le contexte qui entoure l’utilisation de ces armes : il est sans nul doute plus éclairant que la plupart des jugements rapides que l’on entend de ci de là.

Tout d’abord la Syrie : il s’agit d’un pays riche en pétrole, dernier bastion du socialisme Ba’ath, c’est-à-dire du rare parti moyen oriental laïque. Pays relativement développé, la Syrie était, avant le déclenchement des hostilités, en position de force pour assurer le leadership de l’ensemble de la région, suite à la chute de l’Irak de Saddam Hussein. La Syrie est par ailleurs un pays créé de toute pièce sur des ethnies différentes et parfois culturellement assez éloignées, sur la base d’un pan arabisme assez présent dans l’entre deux guerre et dont l’après guerre va signer la chute : chaque pays arabe (Syrie, Egypte, Jordanie, Arabie Sahoudite…) rêvant de réaliser le pan arabisme… Sous son égide!

Dans ce climat le socialisme Ba’ath impose une voie médiane construisant, notamment sous l’impulsion de Michel Aflak, un socialisme arabe qui prône l’indépendance totale des pays arabes vis-à-vis des intérêts occidentaux. C’est le choc du Nassérisme, dont un des partis émule prend le  pouvoir en 1961 en Syrie, conduisant le Ba’ath dans la clandestinité et dans la complicité avec l’armée dans le but de renverser les Nasséristes.

Dans la nébuleuse de cette opposition, les communistes et l’aile marxiste du Ba’ath finissent par prendre l’ascendant. Les modérés type Aflak sont vidés du parti quand celui-ci prend le pouvoir en 1963 avec le soutien de l’armée.  C’est de la branche nationaliste, opposée à la branche marxiste, dont est issu Bashar El Assad.

Dans ce contexte interne déjà sujet aux divisions, sur fond de guerres tribales et de divisions ethniques, des pays étrangers ont placé la Syrie au centre de l’échiquier. La Russie se sert d’une des bases navales Syriennes pour héberger une partie de sa flotte méditerranéenne, tandis que la Turquie voit comme un obstacle cette puissance qui freine sa tentative de reconstitution de l’espace d’influence Ottoman. L’Arabie Saoudite tente d’exporter son modèle religieux fondé sur le Wahhabisme et la Salafisme, sans oublier les pays « occidentaux ».

La place des pays occidentaux nous intéresse particulièrement.
D’ici 2020 les États Unis visent, via l’exploitation des gaz de Schiste, à l’autonomie énergétique. Comme conséquence directe, la route commerciale du pétrole,ne bénéficiera plus de la même attention de la part des Américains : une place sera à prendre pour qui voudra. Notons que dans le même temps, l’Europe restera fortement dépendante de l’énergie importée et transitant par là. En 2007 l’Europe importait 50,5% de son énergie (Eurostat) et ce pourcentage est en augmentation.
Dans cet échiquier, l’Europe a tout intérêt à montrer qu’elle peut assurer la fonction de police dans cette zone, de manière à préserver une certaine latitude vis-à-vis de son énergie, ce qui explique la posture va-t-en-guerre des dirigeants Européens disposant d’une force de projection (France et Grande Bretagne)… Et quelle autre excuse peut-on servir à une population pour la faire entrer dans un conflit que celle des armes chimiques et notamment du Sarin, neurotoxique bien célèbre pour son utilisation dans le métro de Tokyo?

Il est beaucoup plus facile de faire produire du pétrole à l’étranger et de le faire venir en Europe plutôt que d’expliquer à des électeurs que l’on va devoir ouvrir une centrale nucléaire à deux kilomètres de chez eux, surtout quand lesdits électeurs sont Allemands et partiellement écolos.
Il vaut donc mieux exporter une démocratie faible et faire retomber des pays dans le moyen âge islamiste plutôt que de les laisser prendre trop de pouvoir et menacer des intérêts énergétiques nécessaires au « Panem et Circenses. »

La guerre en Syrie est impérialiste, telles celles de l’Athènes antique, en direction d’un Empire non assumé.

A croire que le propre de la Démocratie c’est d’exporter la guerre partout pour avoir la paix chez soi.

Roman Ungern

 

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