Chretienté/christianophobie

Voi dai nemici nostri, À noi date vittoria

Rares sont les journées vécues donnant le sentiment qu’elles appartiennent déjà à l’Histoire, qu’elles marquent un véritable tournant, qu’elles sont situées entre un « avant » et un « après », qu’il s’agit de  journées de prise de conscience, de réveil. En ce qui concerne la Corse, celle du 28 juillet 2016 me semble appartenir à cette catégorie.

Le matin, je me suis réveillé en apprenant que le Front de Libération Nationale de la Corse avait adressé un message à l’Exécutif territorial corse et aux Musulmans de Corse  au sujet du danger représenté par le terrorisme islamiste. Je ne tardais pas à lire l’intégralité dudit texte, dont l’original est disponible sur le site de France 3 Corse – Via Stella[1] et dont de larges extraits ont été repris tant par les médias locaux que par ceux de l’Hexagone. Puis, le même jour, l’Assemblée de Corse a voté, à l’unanimité et toutes tendances confondues, une résolution prioritaire proposée par l’Exécutif de Corse et portant sur le même sujet, à savoir le danger que fait courir l’islamisme radical et les mesures urgentes qu’il convient de prendre pour s’en prémunir[2]. Seuls les quatre conseillers territoriaux communistes se sont opposés à la résolution. En fin de journée, j’ai participé avec des milliers d’autres Bastiais à une messe solennelle en la cathédrale Santa Maria de Bastia, en mémoire du Père Jacques Hamel, le prêtre catholique lâchement assassiné par deux jeunes minables dans une église de la lointaine Normandie. La messe à laquelle j’ai assisté rassemblait autant de monde, et peut-être davantage, que la fête de Pâques ou celle de Noël. La grande église de la citadelle de Bastia était pleine, alors que c’était un jour ordinaire, un vendredi. La veille au soir une messe similaire avait aussi attiré la foule à la cathédrale d’Ajaccio.

En 24 heures, plus que toute autre région du continent, la Corse a su prouver au monde sa force et son unité face au péril mortel représenté par le pseudo « État islamique » et ses affiliés et sectateurs cachés parmi nous. La « rébellion » corse du FLNC, forte de 40 années d’actions violentes souvent contestables (mais qui ont cependant permis à la Corse d’échapper partiellement à la spéculation et la bétonisation), s’est exprimée par un communiqué clair et – faut-il le reconnaître ? – bien écrit. J’ajoute que cette violence nationaliste corse, condamnable comme toutes les formes de  violence, a fait couler relativement peu de sang, contrairement à la violence du terrorisme islamiste. Le communiqué de l’organisation clandestine corse contenait cependant quelques affirmations ou approximations erronées. Non, il n’y a pas eu 40 % de Musulmans parmi les victimes de l’épouvantable attentat commis à Nice le 14 juillet dernier. Ce chiffre, avancé à la légère par un imam niçois, fut ensuite repris sans vérification aucune par nombre de médias français, et le FLNC l’a également repris à son compte. Il y a eu 8 victimes musulmanes (sur 84). Si elles ont le droit, comme toutes les autres, au respect et si leurs familles méritent toute notre compassion, il n’était cependant pas nécessaire d’en exagérer le nombre. Nous savons tous que le terrorisme est aveugle et qu’il peut toucher tout un chacun, quelle que soit sa religion – ou son absence de religion. Dans son texte, le FLNC condamne l’interventionnisme militaire français tous azimuts. Certes, certaines opérations militaires françaises furent, par le passé, éminemment critiquables, voire condamnables. Cependant, en 2003, je fus le témoin des bienfaits de l’Opération Artémis en Ituri (RD Congo) ainsi que du soulagement des populations locales en voyant arriver les militaires français (j’ai même rencontré des Corses parmi ces derniers !) Plus récemment, nul ne pourra contester le caractère positif de l’intervention française au Mali qui a libéré les populations du nord du pays du joug des terroristes islamistes. Cela dit, il est vrai que l’opération franco-britannique en Libye a eu des conséquences catastrophiques tant pour le peuple libyen que pour ceux de la région (la crise malienne que je viens d’évoquer est malheureusement une conséquence directe de la crise libyenne !) Et la politique hasardeuse de la France en Syrie n’a fait qu’aggraver une situation déjà dramatique et fort compliquée. Enfin, je ne voudrais pas me hasarder à polémiquer ici avec le FLNC au sujet des vertus et des mérites supposés des luttes de libération vietnamiennes et algériennes et, surtout, de leurs tragiques conséquences dont furent victimes tant de Vietnamiens et d’Algériens (et aussi beaucoup de Corses qui vivaient dans ces pays). Le communiqué du FLNC, hormis ces quelques inexactitudes, a cependant le mérite de souligner les enjeux et les dangers de la situation actuelle, sans s’en prendre aux Musulmans qui vivent et travaillent parmi nous et qui font partie de notre « communauté de destin ». Il désigne cependant clairement l’ennemi : l’État islamique et l’idéologie mortifère et rétrograde que ce dernier tente de véhiculer jusque dans nos cités, comme celle des Jardins de l’Empereur à Ajaccio, par exemple. Enfin, le FLNC fait deux révélations : il affirme avoir rencontré des représentants de la communauté musulmane de Corse l’an passé et aussi avoir permis de déjouer une tentative d’attentat islamiste contre un lieu public en juin dernier.

Quelques jours plus tôt, avant le drame de Saint-Etienne-du-Rouvray, un vote était intervenu à l’Assemblée Nationale, à Paris. Nos grands médias en ont très peu fait état. Ce vote concernait un amendement proposé par l’opposition. S’il avait été adopté, il aurait permis de fermer toutes les mosquées et salles de prières salafistes de France. Les députés socialistes et écologistes ont voté comme un seul homme pour rejeter ledit amendement. Les quatre députés corses, dont l’un appartient à l’actuelle majorité législative, ont tous voté en faveur de l’amendement. Là encore, les Corses semblent avoir fait preuve de davantage de lucidité que les Continentaux. Ils ont su faire abstraction de leurs divergences politiciennes pour se rassembler autour de l’essentiel : faire face à la menace terroriste islamiste de manière claire et déterminée.  On notera que la résolution votée par l’Assemblée de Corse et le communiqué du FLNC contiennent tous deux la même exigence, à savoir la demande de fermeture des lieux de culte où prêchent les radicaux et l’expulsion de Corse de ces prêcheurs de haine, d’intolérance et de valeurs contraires à l’égalité et à la démocratie.

Malheureusement, les politiciens continentaux, qu’ils soient au pouvoir ou qu’ils siègent sur les bancs de l’opposition, continuent à hésiter ou à tergiverser quand il s’agit de prendre des mesures fermes et courageuses. Les calculs électoraux se cachent trop souvent derrière l’affichage de bons sentiments que l’on pourrait résumer en deux mots : « pas d’amalgames ». Certes, il ne faut pas rejeter ou stigmatiser une fraction de la population à cause de son appartenance religieuse. Certes, il convient de redoubler d’efforts en vue d’une meilleure intégration de tous, pour un meilleur « vivre ensemble ». Mais la volonté d’atteindre de tels buts ne signifie pas abdiquer nos valeurs et nos principes moraux, qu’ils soient laïcs ou religieux, pour laisser place à d’autres valeurs et principes venus tout droit du haut Moyen-Âge. Nombre de Musulmans ou de Français de tradition musulmane attendent précisément cette fermeté et cette clarté de la part de nos décideurs politiques. Sous le quinquennat précédent, ils ont malheureusement vu le président et le gouvernement légitimer la fraction la plus rétrograde de l’Islam. Sous le quinquennat actuel, ils ont assisté à la poursuite de telles compromissions, tant au niveau national qu’au niveau local. Là où il aurait fallu parfois savoir dire « non ! », ils ont vu les ministres, les élus régionaux et départementaux, les maires de grandes villes, faire toujours davantage de concessions, voire même sembler encourager l’Islam obscurantiste et les « prêcheurs en eau trouble ».  Combien de temps aura-t-il fallu attendre, et surtout combien d’attentats sanglants aura-t-il fallu déplorer, pour que le Président de la République et son Premier Ministre se décident enfin à prononcer les mots qu’ils se refusaient auparavant à utiliser : ceux de « terrorisme islamiste » ? Malheureusement, les mots ne suffisent plus, désormais. Il faut à présent passer aux actes et enfin fermer les mosquées et salles de prières islamistes radicales, expulser les imams salafistes et les prêcheurs étrangers appelant au djihad, appliquer de manière résolue la législation sur le voile intégral, désengorger les prisons en renvoyant chez eux les étrangers condamnés ainsi que ceux qui répandent le virus islamiste dans les centres de détention, réaffirmer les principes d’égalité hommes-femmes dans tous les domaines, en particulier dans les programmes de l’éducation nationale. Il ne s’agira pas là de stigmatisation, mais de principes de précaution pour contribuer à assurer la paix et la sécurité, dans l’intérêt de l’ensemble de la population, quelle que soit son origine.

Il est regrettable qu’il ait fallu attendre l’Assemblée Territoriale de Corse ainsi qu’une organisation clandestine de cette île pour affirmer haut et fort cette clarté et cette fermeté face à l’État islamique et à ses affiliés locaux. L’initiative aurait dû venir, depuis longtemps, de l’État français et de ses représentants. Puisse ces derniers répondre aux demandes venues de Corse et prendre les mesures qui s’imposent. Car, à n’en pas douter, la « guerre » que nous livre la terreur islamiste ne fait que commencer. Alors, pour reprendre la supplique contenue dans les deux premiers vers du dernier couplet du Dio vi Salvi Regina, le vieil hymne national et religieux de la Corse, « Voi dai nemici nostri, À noi date vittoria » (Donnez-nous, sur nos ennemis, la victoire) !

Hervé Cheuzeville

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